Hockey féminin : Le temps de passer aux choses sérieuses
Par Luc Robert
À l’heure où les joueuses d’Équipe Canada de hockey féminin ont remporté les honneurs de la Série de la rivalité sur les Américaines, par un jeu blanc de 5-0 à Laval, le moment semble idéal pour établir si une formation professionnelle aura un avenir à Saint-Jérôme.
Les Canadiennes ont disputé leur « Série du siècle », en remportant les honneurs du Défi de la rivalité 4 gains contre 3, après avoir laissé la victoire aux États-Unis lors de 3 premiers duels.
« Voir le calibre des meilleures joueuses au pays, c’est toujours intéressant, même s’il n’y a que les Américaines qui puissent nous offrir une compétition valable au niveau international. Mais, si la formation de la Force s’installe un jour à Saint-Jérôme, ce sera un niveau inférieur, du genre de la LAH par rapport à la LNH. Ce que j’ai vu lors des deux matchs de la Force présentés ici, c’était l’équivalent d’un niveau Midget BB masculin, sans plus », a témoigné un entraîneur local d’expérience, qui préfère taire son nom, de peur de recevoir des tomates par la tête.
Un souhait du maire
Rappelons que le maire Marc Bourcier a profité du passage de la Force de Montréal à l’aréna régional RDN, pour souhaiter tout-haut dans Le Nord que la formation de la Premier Hockey Federation (PHF) transfère ses pénates.
« M. Bourcier a fait un bon calcul avant de s’avancer : les pièces du casse-tête pourraient tomber en place. Les joueuses de l’équipe nationale, donc du meilleur niveau féminin, sont à quelques mois de démarrer une Ligue professionnelle élite, l’automne prochain, avec des investisseurs majeurs et le syndicat de la Professional Women’s Hockey Players Association (PWHPA). Si l’initiative voit le jour, il y aura deux clubs féminins professionnels à Montréal et c’est là que la Force deviendrait disponible à une relocalisation », a prédit notre entraîneur, qui a gardé ses entrées dans le petit monde du hockey.
C’est en effet à l’Auditorium de Verdun, plus précisément au Centre 21.02, qu’une quarantaine d’athlètes, dont une vingtaine de joueuses du Programme national de hockey féminin, s’entraînent quotidiennement à notre sport national. La Force y a aussi pignon sur rue.
« La formule permettant aux meilleurs espoirs féminins de s’entraîner à temps plein est excellente pour notre développement. Les salaires d’une ligue élite professionnelle vont-ils se répercuter sur les meilleures joueuses de la Premier Hockey Federation ? Je n’en ai aucune idée et je n’ai pas de recette miracle à proposer. Mais, plus il y aura de clubs professionnels féminins, meilleures nos jeunes filles deviendront », a souligné la capitaine de la Force, Ann-Sophie Bettez, qui a côtoyé les vedettes au cours de ses 11 saisons de carrière, entre autres dans la Canadian Women’s Hockey League (CWHL), avec les ex-Canadiennes de Montréal.
Questionné à savoir s’il pouvait se payer certaines joueuses d’Équipe Canada dans son alignement, le président de la Force, Kevin Raphaël, est demeuré diplomate.
« Ah, les Olympiennes ! Elles peuvent se joindre à nous. Sinon, ce sera ok pareil, car une jeune relève talentueuse se pointe. Par exemple, Jade Downie-Landry (7b, 12a, 19 points) sort de l’Université McGill et elle domine nos compteuses. Le talent ne se trouve pas uniquement avec l’équipe nationale », a-t-il insisté.
L’entraîneur associé de la Force, Pierre Alain, croit aussi au potentiel de son circuit, à Saint-Jérôme ou ailleurs.
« On a des filles qui sont mariées, parmi l’alignement. C’est du sérieux comme équipe et ligue. Les assistances de 1 000 personnes prouvent aussi l’intérêt. »
Reste que l’Équipe nationale a attiré plus de 4 500 spectateurs à Trois-Rivières et plus de 5 500 amateurs à la Place Bell de Laval. La Force dispute ses parties dans des amphithéâtres plus modestes.
« En tout cas, je souhaite la création d’une ligue pro, pour que les filles aient enfin la chance de disputer des matchs qui signifient quelque chose », a achevé à RDS Gina Kingsbury, la directrice du programme féminin d’Équipe Canada, au sujet des nombreuses joutes hors-concours que sa formation livre souvent aux Américaines.