(Photo : Gérard Coderre)
Château de Chenonceau, vallée de la Loire, France

Gérard Coderre : Un sac à dos, 1300$ et un rêve

Par Journal-le-nord

1er juin 1972: Gérard Coderre, un jeune étudiant de 24 ans qui remet ses études et son avenir en question, décide de réaliser son rêve de faire le tour du monde. Après avoir acheté un aller simple à 100$ pour Paris, il part avec un sac à dos et 1300$. Il ne reviendra au Québec que 27 mois plus tard après avoir parcouru 75 pays. Aujourd’hui âgé de 72 ans, cet amoureux du voyage nous raconte son histoire.

Le jeune routard atterrit donc en Europe avec le strict minimum et poursuivra son périple avec un budget de 3$ par jour. Au terme des 27 mois, il n’aura dépensé que 4000$ incluant les billets d’avion, de train et de bateau. « J’ai appris très rapidement à coucher à la belle étoile, faire de l’auto-stop, du transport en commun. J’ai passé plus d’un mois au Congo et ça m’a coûté 15$. », se souvient-il.

Un mode de vie

À la suite de sa première année de voyage qui lui a fait visiter l’Europe de l’ouest, une partie de l’Afrique et du Proche-Orient, il se retrouve à Munich en Allemagne. N’ayant que 300$ sur lui, il se trouve deux emplois à temps plein en hôtellerie où il travaillera pendant quatre mois et amassera 2000$. « En quittant Munich, je me suis retrouvé le soir dans la Forêt noire. Je faisais de l’auto-stop et je savais qu’à la noirceur, il n’y aurait personne pour me prendre. Alors j’ai trouvé un cimetière de voitures; je me suis couché sur une banquette arrière. Ce soir-là, malgré les difficultés, c’était clair dans ma tête que je ferais le tour du monde, que c’était mon mode de vie et qu’il n’y avait plus rien pour m’arrêter. »

Le routard traverse ensuite l’Asie, puis se rend jusqu’en Australie où il travaille à Sydney pendant un mois. Billet de bateau en poche, il se rend jusqu’au Panama à partir d’où il fait le tour de l’Amérique du Sud pour ensuite remonter vers l’Amérique centrale et puis vers l’Amérique du Nord. « Quand je suis arrivé au Grand Canyon en Arizona, il me restait 65$. Mes chaussures étaient foutues. Je n’avais pas les moyens de m’en acheter une autre paire donc j’ai trouvé des chaussures qui étaient meilleures que les miennes dans une poubelle et j’ai fait l’échange », raconte-t-il. Il se rend jusqu’à Vancouver où il entame le dernier droit pour retourner chez lui en ne dépensant qu’une dizaine de dollars. « À l’époque au McDonald, pour un dollar, tu mangeais très bien. »

Contraste frappant

Sur la route du retour, le voyageur a vécu un choc après de nombreux mois passés à l’étranger. « Je suis entré dans une épicerie; il y avait des rangées complètes de nourriture pour les chiens et les chats. J’ai figé. J’avais oublié la réalité nord-américaine », se remémore-t-il. Ce dernier a en effet été témoin de réalités bien différentes au cours de son périple.

La vie de famille

Peu de temps après être revenu chez lui, le jeune homme a rencontré sa conjointe avec qui il s’est marié 6 mois plus tard à l’âge de 27 ans. Il a ainsi mis sa vie de voyageur de côté pour débuter sa vie familiale. Dès que les trois enfants du couple furent suffisamment âgés, les voyages en famille ont débuté : camping à travers le Canada, tour des États-Unis, visites au Guatemala et au Mexique.

De retour sur la route

À 50 ans, une fois les enfants devenus adultes, Gérard s’est remis à voyager à travers le monde, seul ou avec sa conjointe. Depuis 22 ans, il voyage environ 4 mois par année. Il passe le reste du temps dans les Laurentides à Saint-Adolphe-d’Howard où il réside depuis 15 ans. À présent, il aime voyager en fonction des fêtes; il était à Rio lors du Carnaval, en Thaïlande lors de la Fête des éléphants ou encore au Pérou pour la Fête du sang. « C’est une explosion de couleurs, les gens ne regardent pas si je prends des photos ou non, je me sens moins touristes et ce sont des bains de foule incroyable. » Encore aujourd’hui, Gérard voyage très simplement; avec un sac à dos et son matériel pour faire de la photo.

Partout où il va, le routard tient à vivre l’expérience de manière authentique. « Je me considère très bien logé dans les Laurentides, mais quand je voyage, je suis comme un pauvre parmi les pauvres. Je prends l’autobus local avec les canards, les poules et les cochons. Ce que j’ai à la maison, je ne sens pas le besoin de l’avoir ailleurs », explique-t-il. Selon lui, il est important de s’adapter à la culture locale. « Les gens veulent voyager, mais si le pays doit s’adapter à leurs besoins, ils perdent l’essentiel selon moi. »

Jumeler deux passions

Gérard aime aussi l’écriture et a pu jumeler cette passion à celle du voyage. Lors de son premier tour du monde, le voyageur avait écrit 1000 pages manuscrites qu’il n’avait toutefois utilisées que pour son intérêt personnel. Or, lorsqu’il a recommencé à voyager, il s’est mis plus sérieusement à l’écriture et a publié des articles dans Le Soleil, Le Droit, La Presse et d’autres magazines. Il a aussi écrit un livre intitulé «Vagabondage» et à travers duquel l’auteur cherche à faire découvrir les endroits les plus fascinants de la planète.

Un retour en catastrophe

En mars dernier, Gérard et sa femme étaient en Nouvelle-Zélande lorsque la pandémie a débuté au Québec et dans plusieurs pays. « Un moment donné, ils nous ont donné 48 heures pour soit s’installer ou partir. J’ai appelé en pleine nuit à Montréal. Je suis parti le 28 mars à 23h et à minuit, c’était barré », raconte-t-il.

Ensuite, le voyageur confiné à la maison a profité de son temps pour retravailler une centaine de ses textes. Il a déjà quelques idées de voyage en tête et croit qu’il sera un des premiers à accepter de voyager à nouveau lorsqu’il sera possible de le faire. En raison de la pandémie, il n’a pas été en mesure d’aller à Tahiti et envisage de remettre ce voyage à l’automne 2021. Sinon, il pense aussi à l’Antarctique où il n’a jamais mis les pieds.

Le voyage, une école de vie

Le voyage a été pour Gérard, et l’est encore, une école de vie incroyable. « Ça permet de relativiser bien des choses que nous vivons. Ça permet aussi de connaître la valeur de l’argent », souligne celui qui depuis son retour sur le marché du travail à 26 ans, tient à rentabiliser ce qu’il gagne. « Avec 15$, je me disais que je pouvais faire 1000 kilomètres en train en troisième classe en Indonésie. L’argent pouvait m’amener beaucoup plus loin qu’un dîner au restaurant. »

Enfin, les rencontres que le voyageur a fait au cours de ses périples, aussi brèves soient-elles, ont été significatives et ont souvent fait toute la différence. « On se rend compte que les valeurs humaines et morales sont les mêmes partout. »

Pour Gérard Coderre, le voyage est un privilège et il est devenu son mode de vie. « Le plus beau cadeau qu’on puisse se faire dans la vie, c’est de voyager. »

Les destinations coup de cœur

Asie : Inde, Chine, Myanmar

Europe : Grèce, Italie, Espagne

Proche-Orient : Turquie, Yémen, Jordanie

Afrique : Maroc, Mali, Égypte

Amérique : États-Unis (pour ses grands parcs nationaux), Équateur (pour la route des volcans, ses peuples minoritaires et les Îles Galapagos), Guatemala (retour au pays des Mayas)

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