Un bien drôle de paradis
Par Mimi Legault
S’il existe une histoire qui m’a toujours fascinée, c’est bien celle d’Adam et Ève. M’mande pardon? Vous voulez savoir leur nom de famille? Aucuuuuuune idée! C’est finalement un conte assez macho pour peu que l’on s’y arrête. Mais si vous lisez le moindrement la bible, vous réaliserez rapidement que cela a été écrit par de vieux mâles qui détestaient que la femme soit leur égale. En touié cas, comme disait ma tante Rose, notre voisine. Macho je disais donc, parce que paraîtrait que c’est l’homme que Dieu créa en premier, Toujours l’Homme, maudine. Mais ce qui est pire, c’est que l’on raconte que sa compagne fut créée par une côte d’Adam. Celle-là, elle est bonne. À St-Sauveur, ça fait longtemps que ça ne nous énerve plus des côtes. On les monte, on les descend et on n’écoeure pas personne avec ça. Mais lorsque le gars a vu sa propre côté changée en une belle femme, il la fit mettre debout pour l’admirer dans toute sa splendeur, d’où le nom de « côte levée».
Adam et Ève vécurent heureux mais n’eurent pas d’enfants. Pas tout de suite! Heureux, vous dites? Ils n’avaient pas de voisins au-dessus de leur tête, pas de verglas, pouvaient dormir la porte débarrée. Faisaient du nudisme à ciel ouvert. Vivaient d’amour et d’eau fraîche. Et parfois, ça devenait ben plate. Mais ils étaient polis ou trop pognés pour se l’avouer. Tous les matins, les deux tourtereaux se levaient de «bonheur». Il arrivait que l’autre avait mauvaise haleine, Ève arrivait alors avec un genre de tube dentifrice en demandant : as-tu ta brosse Adam?
Un jour, le Big Boss vint les visiter. Il était curieux de connaître leur loyauté envers celui qui leur avait donné la vie. Dans un éclair de génie, le Suprême leur ordonna juste une toute petite chose : de ne pas mordre dans le fruit défendu. Une pomme!!! Me semble que ce n’était pas trop leur demander. Ben non. A fallu qu’ils aillent lui tourner autour. Qu’ils se fassent tenter, solliciter. Pourtant le Grand Patron les avait bien avertis : ils auraient des «pépins» si jamais ils croquaient dans une McIntosh. Savez ce que c’est une défense, c’est tentant en titi. Alors, ils ont mordu. L’Église affirme que c’est Ève qui a croqué la première. Moi, je pense que c’est le beau Adam. Le mâle aurait voulu impressionner sa blonde. Il aurait grimpé dans le pommier en s’accrochant son zibouiboui une couple de fois en sacrant, pas toujours jojo le nudisme! Pas grave les sacres, dans ce temps-là, rien n’était péché. Mais il s’est «dépéché» quand même pour commettre son larcin. Et c’est là qu’Adam aurait mordu le premier. Il a tellement fait ça vite, qu’il s’est étouffé et que le fruit demeura pris dans son gosier d’où le nom de «pomme d’adam», Tout se tient! Mais le Grand Cibole avait tout vu. Pendant qu’Adam grimpait dans l’arbre, le grand Marsoin grimpait dans les rideaux. Le ciel lui tombait sur la tête. Fâché, la grand Manitou les chassa du paradis. Obligés de se débrouiller seuls, Ève oublia de prendre sa pilule et tomba enceinte. Adam fut bien obligé d’admettre sa paternité. Le Général leur avait bien dit : aimez vous les une sur les autres! Multipliez-vous! Mais curieusement, les multiplications provoquèrent des divisions. Et ultimement, le paradis terrestre, ils l’auraient à la fin de leurs jours. L’Homme se rendit à l’évidence, il devait désormais travailler. Ève se contenta d’élever ses enfants en regardant la télévision. Dans la boîte à lunch qu’elle préparait pour Adam, elle prenait bien garde d’y ajouter une belle grosse pomme rouge même si elle avait le cœur en «compote». C’était sans doute là le fruit de son imagination. Qu’importe…
Ce qui est intéressant dans ce récit, c’est que l’Histoire se serait passée durant l’automne au Québec. Saviez pas ? On ne parle pas de bananiers, mais de pommiers. Alors, des pommes, mon vieux, ça pousse dans notre belle province autant à Oka qu’à Rougemont. N’est-ce pas extraordinaire? Au fond, le paradis terrestre serait à quelques kilomètres de chez nous. Suffirait de lui ouvrir la porte…