Le ventre vide
Par Mimi Legault
Alors là, on aura tout vu. Cher Québec Solidaire qui a proposé que l’État ( donc chaque citoyen ) donne un repas gratuit aux enfants qui fréquentent l’école. J’ai lu les deux articles à ce sujet, l’un proposé pas Mathieu Bock-Côté et l’autre par Gabriel Nadeau-Dubois de QS. Et j’ai la chance d’avoir 35 ans d’expérience en enseignement. Je sais de quoi je parle même si depuis que j’ai quitté le milieu scolaire, les choses, côté argent se sont morpionnées. Je partage entièrement le propos de Bock-Côté. Moi-même mère, je n’aurais jamais voulu que l’un de mes enfants manque de nourriture. C’est clair comme du jus de chique! Mais ce qui me heurte au plus haut point, c’est la façon qu’ont les gens de téter les mamelles de l’État.
Ne vous en faites pas, bonnes gens, l’écho se fait entendre : mais t’as pas de cœur, Mimi? Ça existe des enfants qui arrivent à l’école le ventre vide. Eh bien, je vais en profiter pour justement me vider le cœur sur les faux pauvres qui ont compris le système. Exemple, une amie, lors du temps des Fêtes s’est toujours fait un devoir d’aller porter des paniers à des gens démunis. Comme elle m’a avoué en décembre dernier, dans quelques lieux où elle allait déposer les denrées, ce n’était pas ce qu’on appelle des miséreux. Lorsqu’elle entrait dans certaines maisons, l’indigence ne régnait pas en maître. Je trouve que ce procédé va engendrer beaucoup de problèmes. Je les vois venir à l’horizon. Qu’on ne se méprenne pas : offrir gratuitement à chaque enfant un repas gratuit signifie que l’État viendra chercher les sous dans nos poches. Pourquoi CHAQUE enfant? D’après Québec Solidaire 1 enfant sur 5 se présente à l’école le ventre vide. Alors c’est de ce 20% qu’il faut s’occuper. Ça presse! Il ne faut pas attendre que l’enfant ait un regard de cannibale pour agir! Le parent moyen ou bien nanti mérite-t-il vraiment ce geste généreux? Bien sûr que non! Donnons à ceux et à celles qui en ont vraiment besoin. Parce les vrais pauvres existent et c’est à eux que j’offrirais les repas.
Imaginez un seul instant les critiques de certains parents : aie, tu as offert à mon enfant du porc, or notre religion défend de manger cette viande; l’autre retentit parce que son enfant était allergique au beurre d’arachides: c’était bien écrit pourtant. Un troisième appelle pour se plaindre : nous, à la maison, on est végane, capiche? Attelez-vous bien, ça ne fait que commencer. Des parents déresponsabilisés, il en pleut. Je vous raconte un fait vécu. Mettons qu’il s’appelait Patrice. C’était l’heure du dîner et mon élève de 8 ans, devant moi, se dirigeait vers la cafétéria. Soudain, je le vois ouvrir sa boîte à lunch et jeter à la poubelle l’unique contenu, un sandwich. Je m’empresse de lui demander le pourquoi du comment. Surpris de s’être fait prendre, il me répond tout penaud que c’est son père qui prépare son lunch, (sa mère a quitté le foyer depuis qu’il est tout petit). Des sandwichs aux cretons, ça fait 9 jours qu’il m’en fait. J’aime pas les cretons…Furieuse, je téléphone au père pendant que Patrice dévore à pleines dents un repas offert par l’école.
Je lui raconte le tout en lui signifiant que son fils n’a rien à boire. Il me répond mollement : y a pas d’eau à l’école? Oh oh ça va mal, mon radar ne le capte pas…Je prends trois respirations coup sur coup. Calme-toi, Mimi. Je lui parle doucement : monsieur, il n’y a aucun accompagnement, aucun dessert. Un fruit peut-être? Et puis, il n’aime pas les cretons. À l’autre bout du fil, j’entends dire : aie ma belle ( Gino en plus…) y aurait pu me le dire tab…. M’as y voir, qu’il me dit. Aussi convaincant qu’un premier ministre.
Une semaine passe. Même si je n’ai pas mangé de cretons, j’ai ceux de Patrice sur le cœur… Je le garde avec moi après le son de la cloche et lui demande d’ouvrir sa boîte à lunch. Piteux, il me la montre. Un jus, une pomme, un sandwich. Le minimum. Le petit me regarde en me disant : c’est un sandwich au jambon. Ok, que je dis…. Mimi, ça fait une semaine que je mange des sandwichs au jambon…