(Photo : Collection de Benoit Guérin, Musée virtuel de Prévost.)
Le pont Shaw vers 1922, alors qu’il était encore construit en bois. Au loin, le chemin de fer du C.N.

Qui a construit le pont Shaw (partie 1)

Par Simon Cordeau

Le 7 juin, le pont Shaw a dû fermer temporairement pour une énième fois. J’ai donc voulu raconter l’histoire de ce pont, au centre de l’histoire de Prévost. Mais je suis tombé sur un mystère insoupçonné.

On raconte qu’en 1842, William Shaw et sa femme, Martha Maria Matthews, s’installent à Mont Pleasant avec un groupe d’immigrants irlandais. Au recensement de 1843, la nouvelle colonie (aujourd’hui Prévost) compte déjà 52 colons. Shaw construit un pont : le premier à traverser la rivière du Nord! Il charge 5 sous pour l’utiliser, et bientôt, le jeune village porte le nom de Shawbridge.

Du moins, c’est ce que dit la légende. Parce que sur le Musée virtuel de Prévost, je lis que William Shaw aurait… acheté le pont d’Augustin-Norbert Morin en 1863? Mais sur une autre page, je lis : « En 1860, le nom de Shawbridge est désormais officialisé en l’honneur de la famille Shaw, par Augustin-Norbert Morin, surintendant de la colonisation. »

Donc le nom Shawbridge précéderait l’achat du pont par Shaw? Pourquoi le village ne s’appelle-t-il pas Morinbrigde, alors? Et qui l’a construit, ce pont? Et quand?

Je contacte donc Cynthia Desruisseaux, responsable culturelle à la Ville de Prévost. Elle saura bien m’éclairer.

Fait divers

Pourquoi je vous raconte tout ça? Parce que j’ai beaucoup d’affection pour le pauvre pont Shaw.

J’ai grandi à Prévost, dans le Domaine Laurentien. Quand j’étais petit, on allait plus souvent à Lafontaine et à Saint-Jérôme, et rarement dans le secteur de Shawbridge. J’ai d’abord connu le pont Shaw dans les journaux locaux. Une fois de temps en temps, on y annonçait qu’il était fermé. Encore.

Avec le temps, le fait divers est devenu une sorte de blague récurrente, un de ces problèmes absurdes qu’on n’arrive jamais à régler, comme les nids de poule après l’hiver ou le dossier de la croix de Sainte-Adèle.

En décembre dernier, le Journal de Montréal rapportait que le pont Shaw a dû fermer pas moins de 23 fois depuis sa remise à neuf, en 2011. Je dois vous avouer : j’ai ri. 23 fois! Mais Paul Germain, le maire de Prévost, est bien loin de rire sur la photo qui accompagne l’article. Et je le comprends.

Le problème, c’est que des camions s’aventurent sur le pont, mais la structure est trop petite pour les laisser passer. Donc le haut du camion accroche, la structure est endommagée, et le pont doit fermer.

Je vous entends, lecteurs. Pourquoi ne pas mettre un panneau interdisant les camions? Il y en a un! Pourquoi ne pas mettre un gabarit, avant le pont, qui indique la hauteur maximale et avertit les camionneurs? Il y en a un aussi! Un camion l’a même arraché en novembre dernier, et le pont a dû fermer pendant 23 jours.

Pendant ce temps-là, le MTQ cherche « une solution à plus long terme ».

Mémoire collective

Mme Desruisseaux me répond rapidement. Entre autres détails, elle m’écrit : « Histoire et Archives Laurentides a récemment découvert que le pont Shaw n’a pas été construit par William Shaw, mais plutôt acheté par ce dernier le 7 août 1863. » Bon, voilà qui est confirmé. « Toutefois, nous ignorons toujours qui l’a initialement construit ou en quelle année. » Zut!

Elle m’apprend aussi que les premiers habitants seraient arrivés « entre 1842 et 1847 », selon les sources, et que la petite communauté s’appellerait alors Juice Town. Un autre nom à ajouter, auprès de Mont Pleasant et Shawbridge. Il y aurait même eu un bureau de poste d’été dans les environs, érigé en 1823. Attendez, 1823?

C’est tôt, pour l’histoire de la région. Pour vous donner une idée, la toute première chapelle de Saint-Jérôme est construite en 1821. À qui servait ce bureau de poste, si les habitants arrivent 20 ans plus tard?

Mais je ne dois pas me laisser distraire dans mes recherches : qui a construit le pont Shaw et quand?

J’écris donc à Henri Prévost, président d’Histoire et Archives Laurentides. Si quelqu’un connaît les méandres de notre histoire régionale, c’est bien lui!

Suivez la suite de mon enquête dans une prochaine chronique.


Lisez la Partie 2 et la Partie 3.

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