Le Pays de la motoneige

Par Daniel Calvé

Chronique « 9 mois en artique »

Le jour s’est enfin levé au Bamsebu après trois mois d’absence, irisant le ciel de reflets violacés. Une occasion de célébrer après un rude hiver polaire où la température frôlait souvent les -35 Celsius, sans compter le facteur vent. Même la petite hutte non isolée construite en 1930 tremblait de froid. La température à l’intérieur est descendue jusqu’à -3. Une nuit, les rafales de neige ont été si violentes qu’elles ont complètement bloqué la porte, obligeant Hilde et Sunniva à sortir par la fenêtre.

Pascale Lortie
Pascale Lortie

Bien que le soleil ne se couchera à nouveau que l’automne prochain, Hilde et Sunniva n’ont pas le temps de faire la grasse matinée. Nos deux citoyennes scientifiques doivent se mettre au travail et collecter données et échantillons sur le terrain et la banquise. Et avec le retour de la lumière, la tâche est énorme.

J’ai parlé précédemment de l’importance de la technologie et plus particulièrement de l’utilité du drone à imagerie multispectrale qui permet d’obtenir une foule de données précieuses en un temps record. Mais il y a un autre outil indispen-sable bien de chez nous et sans lequel l’expédition « Hearts in the Ice » n’aurait pas été possible : la motoneige. Et c’est
BRP, une entreprise québécoise reconnue à l’échelle planétaire, qui a eu la générosité de soutenir nos deux aventurières en leur fournissant une motoneige Lynx.

La motoneige Lynx leur permet bien sûr de ratisser un territoire beaucoup plus large pour la collecte d’échantillons et l’observation de la faune et de la glace, elle rend aussi leur séjour beaucoup plus sécuritaire. Par exemple, lorsqu’elles ont trouvé la carcasse d’un renne tué par un ours polaire, elles ont pu suivre les traces de ce dernier et recueillir ses déjections (très recherchées par les scientifiques), une opération qui aurait été beaucoup trop dangereuse à pied ou en raquettes ! Enfin
la motoneige leur permet aussi de ramasser et de remorquer jusqu’à la hutte les énormes billots de bois qui ont dérivé depuis la Sibérie jusque dans le fjord. Ce bois est leur seul moyen de se garder au chaud, de cuisiner et de faire fondre la glace.
J’ai toujours cru que le Québec était LE pays de la motoneige mais quand je suis allée au Svalbard (en français : la côte froide), j’ai bien vu que nous n’étions pas les seuls. Là-bas, la motoneige c’est plus qu’un loisir, c’est un style de vie. La petite ville de Longyearbyen compte plus de motoneiges que d’habitants !

En septembre, j’ai été frappée par le spectacle de centaines de motoneiges dispersées dans la ville, attendant patiemment le retour de la neige sur des palettes de bois. D’ailleurs le tourisme d’aventure y bat son plein du retour de la lumière en février jusqu’à la fonte des neiges en mai, la motoneige étant le seul moyen de parcourir rapidement les vastes étendues féériques du Svalbard.

C’est la Norvège qui a la souveraineté de l’archipel du Svalbard. Pendant 300 ans, la chasse était l’activité principale, remplacée par l’exploitation des mines début 1900. Les mines, la recherche et le tourisme sont aujourd’hui les activités principales du Svalbard. Plus de la moitié de la surface des îles est protégée la Norvège qui a institué des lois sévères pour la protection de l’environnement.

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