La belle histoire des Laurentides – Chapitre 5
Par Journal-le-nord
Cinquième d’une série de chroniques rappelant à notre souvenir à quel point le ski et les activités de plein air ont forgé l’histoire des Laurentides et en assurent l’avenir
L’urbanisation
Quelle histoire !
Résumons brièvement l’histoire invraisemblable racontée jusqu’à présent.
En 1838, la défaite des patriotes pousse de nombreux canadiens-français délogés de leurs terres de la vallée du Saint-Laurent vers les contrées montagneuses et peu peuplées situées en bordure de la rivière du nord.
En 1891, la mise en service du « train du Nord », stimule la colonisation en facilitant le transport du bois, du bétail, des produits laitiers, du courrier et des passagers. Percy Douglas et Herman Smith-Johannsen deviennent des passagers assidus de ces trains qui leurs permettent de découvrir un fabuleux territoire pour la pratique du ski et d’y guider de nombreux groupes.
En 1911, l’instructeur professionnel suisse Émile Cochand est recruté par Lorne Mac Gibbon, membre du Montreal Ski Club et président de la « Bank of Montreal » et par Ernest Desbaillets, gérant de l’hôtel Ritz Carlton, pour émigrer au Canada et y établir la première école de ski. Cochand y fonde le Chalet Cochand puis la Laurentian Resort Association qui embauche Herman Smith-Johannsen pour développer le réseau de sentier de ski des Laurentides.
De 1930 à 1960, la renommée des Laurentides est telle que les montréalais et les touristes du Québec, de Toronto, de Boston, de New York et de la Nouvelle-Angleterre y affluent. L’impressionnant réseau de ski nordique et la qualité des centres de ski et hôtels de calibre mondial font en sorte que cet afflux des visiteurs ne cesse de croitre.
Au cours de cette période, la liaison entre Montréal et les Laurentides est assurée par le train et la route 11 (actuelle 117).
La route du changement
Avec l’utilisation de la voiture qui gagne en popularité, la congestion sur la route 11 (actuelle 117) est de plus en plus perçue comme un frein majeur au développement des Laurentides.
Comme la solution semble passer par la construction d’une nouvelle voie rapide, une première section de l’autoroute des Laurentides est ouverte à la circulation en 1958 et devient la première autoroute québécoise. Elle atteint Saint-Jérôme en 1959, Saint-Sauveur en 1963, Sainte-Adèle en 1964 puis Sainte-Agathe-des-Monts 10 ans plus tard.
À l’image du train au siècle précédent, cet événement marque un tournant important de l’histoire des Laurentides, des activités de villégiature qui s’y pratique et du mode de vie qui s’y installe.
Tout d’abord parce que plusieurs sites sont détruits pour l’aménagement de cette voie rapide, dont le sentier Maple Leaf, la piste Big Hill de Shawbridge et le versant est du centre de ski Sun Valley.
Les grands hôtels sont aussi progressivement délaissés en raison de la facilité nouvelle des aller-retour en voiture depuis Montréal qui permet dorénavant de visiter les Laurentides sans devoir y séjourner pour la nuit. Plusieurs d’entre eux sont fermés, vendus puis démolis.
Les petits centres de ski ferment progressivement au profit des plus grands centres. Comme pour les agriculteurs qui vendent progressivement leurs terres peu fertiles, les petits centres de ski sont souvent vendus à des promoteurs et font place au développement de résidences secondaires très prisées des citadins à la recherche de grands espaces, mais qui souhaitent en profiter privément.
Abandon du train
Le P’tit Train du Nord, épine dorsale du développement des Laurentides supporte mal le développement du réseau routier qui relie maintenant Montréal aux Laurentides. Délaissé par sa clientèle, le service est interrompu une première fois en 1960.
Le service reprend en 1977 avec la création de VIA Rail puis cesse définitivement ses opérations en 1981.
Transformation des paysages
Au-delà des sentiers et des centres de ski, la véritable richesse des Laurentides réside dans sa matière première : la qualité du relief montagneux, la fraicheur de ses lacs et rivières, l’abondance de la neige et le couvert de ses forêts.
Ces qualités d’un territoire encore naturel et peu peuplé furent jadis rehaussées et mises en valeur par le déboisement de valons et flancs de montagnes par les colons du siècle précédent et par les chemins non déneigés qui en traçaient les contours durant l’hiver.
Mais l’urbanisation accélérée des années ’60 et ’70 affecte grandement ce qui a longtemps fait la marque des Laurentides
L’urbanisation s’accélère. Les paysages se transforment. Les pentes jadis dégagées se reboisent. La friche repousse les terres déboisées. Les routes se déneigent. Les espaces urbanisés germent dans les champs. Les grands espaces se morcellent. La cime des montagnes se privatise. Les sentiers s’atrophient.
Un espoir renait
Face aux assauts de ce développement effréné, une prise de conscience s’amorce et la notion de développement durable prend forme.
De nombreuses actions sont entreprises au tournant du millénaire pour préserver les espaces naturels encore existants afin de les rendre disponibles aux générations futures et pour y préserver la faune et la flore qui s’y trouve.
Ces activités feront l’objet d’une dernière chronique de notre histoire qui ne saurait s’achever autrement que sur une note d’espoir, de dévouement, de générosité et de courage… politique !