L’homme et la bête
Par Mimi Legault
Je demeure subjuguée par les outardes, ces oies sauvages qui, comme les Snowbirds décident de quitter le froid pour choisir le Sud.
Vous les apercevez là-haut voler en formant un V, ce qui représente une efficacité de 71% supérieure à celle qu’elles auraient si elles décidaient de voler en solitaire. Comme quoi, elles ont compris le principe de la solidarité. Et non, ce n’est pas l’Humain que le lui a appris. Lorsque l’outarde est en tête et se trouve fatiguée, elle se rend derrière et une autre vient prendre sa place. Pas de jalousie! Les oies qui sont en arrière cacardent pour encourager celles d’en avant. Lorsque l’une d’elles tombe malade ou qu’elle s’éloigne de sa gang, deux autres la suivent pour lui prêter secours et resteront avec elle jusqu’à ce qu’elle puisse se déplacer à nouveau ou qu’elle meure. Alors, la prochaine fois que l’on vous traitera d’oie, au lieu de leur texter des horreurs, racontezleur cette belle sagesse!
J’aime les animaux. Pour peu qu’on leur accorde de l’importance, ils nous offrent des leçons de vie auxquelles il serait si simple d’y adhérer. Même le porc offre de nombreux points de comparaison avec un autre mammifère sans poil passé expert dans l’art de semer la merde et de se vautrer dedans…Je vous laisse deviner lequel (pensée de Desproges). Malheur à l’animal qui côtoie trop l’homme et qui finit par mourir de ses mauvaises habitudes. À preuve l’histoire des mouettes gavées des reliefs d’une conserverie de poissons, mortes de faim lorsque l’usine ferma. Celle des écureuils apprivoisés qui ne firent aucune provision de noisettes pour l’hiver parce qu’une main les avait nourris puis délaissés.
Celui qui a expédié un jour sa petite famille en vacances et vécu seul avec le chien et le réfrigérateur comprend pourquoi certaines gens parlent à leur chat ou à leur canari. Un chien adulte est l’interlocuteur rêvé. Quand on bavarde avec lui un moment en y mettant peu à peu de conviction et d’intonation voulue, il y prend un tel plaisir qu’il se roule par terre, gigote sur le dos les quatre fers en l’air et gémit de béate admiration. En connaissez- vous beaucoup de conjoint (es) qui réagissent aussi gentiment?
Lorsque mon chat Henri est arrivé dans ma vie, je filais un mauvais coton. Celle qui est venue me le confier venait de l’arracher d’un tyran qui le battait à coup de pied (bottes à cap d’acier). Je pouvais compter ses côtes tant il était maigre.
Mais bon, tous les deux on s’est apprivoisé. Il me mordait à chaque fois que je levais ma main pour le caresser croyant que chaque Homme était mauvais. Aujourd’hui, Henri se roule par terre lorsqu’il m’aperçoit; il vient me jaser ça et je me dois d’écouter comment il a passé sa journée, c’est un mâle… On peut posséder un chien, mais les chats eux vous possèdent. Un chien vous flattera l’égo, mais vous devrez flatter votre chat. Le chien est un employé, le chat travaille à son compte.
Qui a dit : plus je connais l’humain et plus j’aime mon chien? J’en suis presque là après toutes les violences, les horreurs que l’on découvre au quotidien. Il n’y a pas que les chiens qui ont la rage!
Punch était un petit bâtard vraiment insupportable. On l’avait toujours sous les pieds, on butait contre lui dans les escaliers. Il se précipitait le premier à la porte d’entrée quand la sonnette retentissait et il fallait employer la force pour le faire décamper de la chaise longue. Un jour, ma tante Juliette est venue habiter avec nous. Chose incroyable, Punch devint aussitôt un gentleman. Il prit l’habitude d’attendre, comme il se doit, en haut de l’escalier jusqu’à ce que tante Juju fût descendue. Il s’effaçait sur son passage quand elle allait et venait dans la maison, n’occupait la chaise longue que pendant son absence. Dès qu’il l’entendait arriver, d’un bond, il sautait à terre et venait se coucher tranquillement à ses pieds.
Nous n’avons jamais su comment notre petit Punch avait compris que ma tante Juju était non-voyante…