Hypocrisie et mensonges

Par Daniel Calvé

Chronique « Le monde de Mimi »

Ne partez pas en peur tout de suite à cause de mon titre. Écrire une chronique tient parfois de l’art martial. N’empêche que c’est la vérité. Je m’adresse à vous et…à moi aussi. Tous dans le même sac.

Qui peut se vanter de ne jamais avoir été hypocrite? Si un ti-coune levait la main, en plus, il serait menteur. Et qui n’a jamais dit du mal d’un autre? Lorsque j’étais petite, mes parents avaient reçu (ne riez pas, l’histoire est vraie) un cendrier plaqué or avec la grosse face du député au milieu, photographié en fumant une cigarette. À chaque fois qu’il annonçait sa visite, maman s’empressait de sortir le fameux cendrier qu’elle détestait tant pour ensuite le remettre au fond d’une armoire sitôt qu’il nous quittait. Ça me rendait triste de voir ma mère agir comme ça. Si bien qu’un jour, je me suis emparée du maudit cendrier et il a pris le bord de la poubelle du 3e voisin… 50 ans plus tard, j’avoue mon crime. En t’lé cas, comme dirait ma tante Gertrude.

On se canibalise entre nous. On fait semblant, On entend des phrases comme : tu n’as pas vieilli! Allez, saute l’eau n’est pas froide. Madame, on dirait que cette robe a été faite pour vous. Ça ne fera pas mal du tout. Ne nous appelez pas, nous vous rappellerons. On a tous vécu ça. Ou l’éditeur qui affirme qu’il a lu avec attention votre manuscrit mais que malheureusement…Ou la secrétaire qui répond que son patron est très occupé, qu’il ne peut pas vous parler. Ou le dentiste qui vous jure qu’on ne sentira rien. Ou le conférencier qui dit : un dernier mot… Ou le téteux qui vous félicite maladroitement, personnellement je ne connais rien de pire qu’un compliment mal fait.

Être soi-même. Toute une job. On demeure obligé de fausser ses pensées sinon, on n’aurait plus d’amis. Il y a quand même certaines gens qui m’énarvent. Ceux dont l’auréole leur serre un peu trop la tête et qui se font d’eux-mêmes une image si irréaliste qu’ils n’y correspondront jamais. Pour d’autres, la difficulté vient du fait qu’ils passent leur vie à essayer d’être à la hauteur de ce que leur entourage attend d’eux. Fatigant en maudit, ça. Ou les plus tristes : ceux qui ne cherchent qu’une chose, l’approbation, l’affection ou même l’envie des autres.

Le réputé Albert Einstein a bien résumé la chose le jour où de jeunes amis lui présentèrent leur beau bébé de 18 mois. L’enfant jeta un coup d’œil sur le savant qui portait toujours ses cheveux en broussailles et se mit à hurler. Les parents parurent embarrassés. Mais les yeux pétillants, il caressa l’enfant et le félicita : cela me fait plaisir, petit. Tu es la première personne depuis des années à me dire réellement ce qu’elle pense de moi!

L’un de mes proches m’a déjà avoué qu’il n’aimait pas passer tout un week-end chez des amis parce que c’était pénible pour lui de se montrer si longtemps plus aimable qu’il ne l’était en réalité. Je vous donne un autre exemple frappant. Je pouffe de rire à chaque fois que je les vois. Le samedi après midi la SAQ fait goûter des vins. Je vous vois mettre votre nez dans la coupe, faire tournoyer le verre et remettre votre appendice nasal comme un vrai sommelier alors que neuf personnes sur dix n’y connaissent strictement rien. Moi la première. On agit ainsi par peur de paraître ridicule. Et pourtant…

J’aimerais bien entendre un jour un animateur de la télé demander à un politicien : pendant les quelques minutes qu’il nous reste, pourriez-vous nous donner une idée de ce dont vous venez de parler durant une heure? Pas facile d’être vrai mais une chose est sûre : ne vous demandez surtout pas ce qu’on pense de vous, vous ne vous reconnaîtriez même pas!

Mimi Legault
mimilego@cgocable.ca

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