Peuple debout
Par Daniel Calvé
Trop docile, notre peuple ? Ou il a simplement envie délibérément de croire à nouveau, quitte à suivre (parfois aveuglément) son berger et son troupeau ?
Je me suis posé la question en ces temps où le gouvernement québécois atteint des sommets de popularité sans précédent.
Ça dérange certaines personnes, le fait que M. Legault et son équipe semblent faire l’unanimité populaire. En général, ça ne prend jamais longtemps avant qu’on cherche (et trouve) la bête noire. Il ne faudrait surtout pas que quelqu’un soit trop bon, ni plus « fin » que les autres, ici, dans cette contrée où on nous a tristement vendu la fausse noblesse du nivellement par le bas. Petit fond judéo-chrétien, ou réaction d’un peuple (jadis) vaincu qui a perdu ses repères et son identité ?
Une chose est sûre : les gens expriment présentement un désir de faire confiance à leur gouvernement, un qui (pour une fois), n’a rien à leur vendre, à part du gros bon sens.
Les « journaleux » suspicieux « M. Le premier Ministre, si vous aviez su avant, auriez-vous pris une décision différente ? », demande de manière incisive, ce perspicace reporter, à François de Nostredame. Et son collègue conspirationniste, enchaîne ardemment, en fustigeant celui qu’il semble confondre avec Maurice Duplessis : « Pourquoi vous nous cachez des informations en nous gardant dans la noirceur ? »
Je paraphrase à peine. C’est honteux. Des interrogatoires futiles, donnant dans l’arrogance et le sensationnalisme, qui, à part alimenter le cynisme et la suspicion, n’apportent absolument rien de constructif.
On jase là… qu’est-ce que ça donne d’exiger tous les détails confidentiels sur les familles et les victimes ? À part permettre de publier un palmarès quotidien de « peur géolocalisée » et voyeurisme dans des médias, et de construire un roman-savon pour nourrir une psychose générale, ça n’apporte rien. Je connais la joute, je sais que ça fait vendre la copie, en attirant le peu d’annonceurs qui restent, mais c’est vraiment crasse : vos vilenies opportunistes en ces temps humainement névralgiques me sidèrent.
Heureusement, il y a, et j’ose dire en majorité, des journalistes qui ne sont pas des « chiens de garde », mais plutôt des valeureux gardiens de l’éthique, de la pertinence, et de la moralité – des personnes intègres, impartiales, et bien intentionnées qui maintiennent l’équilibre, vulgarisent et rapportent l’information sans sucre ajouté ni complaisance déplacée.
Non, on ne doit jamais donner un chèque en blanc aux politiciens, et on se doit de les questionner sur le pourquoi du comment, car ils sont nos obligés – mais non au détriment de la manière et du bien fondé.
François le Grand
Non, il n’est pas roi de Macédoine, mais il est néanmoins en train de devenir à sa façon, un héros « divinisé » dans le cœur de bien des citoyens. Tout comme Alexandre quelques 300 ans avant J.C., le PM semble représenter le modèle du « conquérant-civilisateur » dans l’imaginaire collectif, alors que plusieurs lui prêtent l’image d’un général de guerre qui viendra à bout de cette pandémie.
Certes, le contexte y joue pour beaucoup, mais ce qui est sûr, c’est qu’aujourd’hui ce gouvernement ressemble à ses citoyens – il est accessible et populaire, sans être populiste. Il complimente, exprime sa fierté, admet ses erreurs, parle anglais avec un accent assumé, prône les bienfaits du verre de vin (!), et exhibe la dégaine d’un bon père de famille en contrôle, avec ses défauts et ses qualités, celui qu’on aime sévère, mais juste.
Lourd bagage
Après les Plaines, la Grande Noirceur, les enjeux de souveraineté, la complexité fédéraliste, les épisodes de corruptions et combien d’autres honteuses commis-sions, les gens veulent résolument changer de diapason. En ces temps où les projets de société sont gelés, où même le
principal club de hockey s’est dénaturé, en devenant outrageusement commercial et organisateur de karaoké politique obligé, on ne sait plus vers qui se tourner côté espoir, authenticité et crédibilité.
J’ai l’impression qu’on a envie de se faire confiance, de gagner, de retrouver nos racines, de sortir de notre coquille et de créer. Allons-nous être les témoins de la mort d’un peuple d’agneaux, et assister à la naissance d’une tribu de béliers ?
Puisse cette aventure collective nous faire pousser une grosse paire de cornes, une qui nous donnera le courage et la lucidité de se réapproprier notre laine, d’en être fier, de la promouvoir, et de la protéger.
On a toujours été « quelque chose comme un grand peuple », on l’avait juste oublié.
JEAN-CLAUDE TREMBLAY
jctremblayinc@gmail.com