L’égo bionique

Par Daniel Calvé

Chronique d’un X

Dans son plus simple appareil, le mot ego signifie le « moi » ou le « je » et n’est que la perception et la conscience que l’on a de  soi-même. On l’associe souvent à la vanité, mais en réalité, l’ego au naturel n’est que le résultat de constructions mentales. Sur le  plan spirituel, religieux ou même en l’absence de croyances à proprement dit, le concept d’ego est généralement mal perçu, car il conduit à l’égocentrisme, ou à l’égoïsme, et c’est là où le bât blesse.

L’avènement des technologies n’ont fait qu’accélérer le mouvement du « moi » et offrent de plus en plus de plateformes bâties sur mesures afin de solliciter l’exhibition de nos jardins jadis privés. Cette tendance lourde n’est pas sans conséquence, car elle renforce, entre autres choses, notre dépendance au regard et aux commentaires d’autrui. C’est comme si nous étions de volontaires prisonniers, avec les réseaux sociaux et autres moyens agissant comme nos ardents geôliers.

50 nuances d’ego

Nous avons tous dans nos réseaux des gens qui publient des statuts d’eux-mêmes chaque jour, même plusieurs fois par jour sans autre motif que celui d’attirer l’attention sur leurs nouveaux souliers, ou autres singularités. Le phénomène du gars ou de la fille qui publie constamment des photos en faisant des mimiques faciales de « duck face » sans aucun contenu est omniprésent, mais somme toute inoffensif dans la mesure où cela n’engage qu’eux-mêmes : ceux qui ne sont pas contents n’ont qu’à changer de chaîne !

Par contre, les égocentriques, particulièrement en position d’influence et d’autorité, qui considèrent leur opinion comme la plus importante, souvent au détriment de celle d’autrui, ça, c’est problématique. Un président américain qui se vante de ses prouesses personnelles peut encore passer, mais lorsque l’on a affaire à un individu avec l’ego individuel démesuré, qui intimide et qui démontre des troubles de la personnalité narcissique, on a atteint un autre dangereux degré en tant que société.

Égocentricité ou droit de s’exprimer ?

Récemment, certains élus provinciaux soucieux du décorum ont rappelé l’importance des règles vestimentaires dans un contexte professionnel. Chacun à son opinion là-dessus, mais chose certaine, la réponse donnée ne peut pas se limiter à « leurs règles sont ridicules, ils ne me mettront pas en boîte, je ne veux pas être comme tout le monde », ou des variations sur ce même thème.

Le décorum, dans ce cas-ci, c’est l’illustration d’une fonction qui nous représente, une sur laquelle NOUS nous sommes entendus. Dans ce registre, le « nous » a préséance sur le « moi », même si dans les faits, je n’ai pas besoin d’un tailleur pour avoir une tête sur les épaules et prendre de bonnes décisions. Il s’agit ici de normes socialement acceptables, dans un contexte et une enceinte bien précise qui selon moi, n’ont rien avoir avec la liberté d’expression.   

Cela dit… Je comprends le besoin légitime d’affirmation et d’unicité, je crois qu’il nous habite tous. Je n’ai jamais vraiment aimé la conformité vide, et sans logique – c’était vrai quand j’étais plus jeune et c’est encore vrai maintenant. Fut une époque où je portais des pantalons mous noirs avec des pois blancs, et j’avais les cheveux en style « high top » qui tenaient six pouces dans les airs ! La différence, c’est que même adolescent, malgré les hormones de la rébellion dans le plafond, j’avais compris qu’il fallait que je change mes vêtements et que je me débarrasse de mon gel capillaire avant d’aller travailler, parce qu’ultimement, j’étais conscient que mon désir de liberté s’arrêtait là où celui des autres allait commencer.

Hier comme aujourd’hui, j’ai toujours cru que l’on pouvait être « soi », et pleinement s’exprimer tout en respectant l’entourage et sa vision de moralité, nonobstant notre ego qui veut constamment s’affirmer et se faire rassurer. Prenons garde, car comme disait Louis de Bonald, les orgueils blessés sont plus dangereux que les intérêts lésés !

jctremblayinc@mail.com

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