Crise d’identité

Par Jean-claude-tremblay

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La semaine dernière, comme plusieurs, j’ai vécu la Saint-Jean-Baptiste la plus bizarre de ma vie. J’ai peut-être passé l’époque de vouloir festoyer jusqu’au levé de Galarneau, mais j’ai toujours apprécié souligner ce moment, cristallisé un 24 juin 1834 par Ludger Duvernay. Là, on était carrément dans un monde parallèle, un où j’avais envie d’à peu près tout sauf de « fêter ». J’ai donc allumé la télé pour zyeuter le spectacle de festivités, là où la fierté est censée régner, et c’est à ce moment que la mâchoire m’a décroché.    

Au début, j’ai cru que cette différence frappante venait du fait qu’il n’y avait pas de public. Ensuite, je me suis dit que c’était parce qu’il n’y avait pas de drapeaux, mais j’ai vite réalisé que j’avais tout faux. La réalité, c’est que cet évènement a été à l’image des sentiments mitigés qui habitent certains québécois en ces temps déstabilisants. Au final, même si les artistes ont très bien chanté, l’accent aigu mis sur le « eux » versus le « nous » des animateurs trahissaient un manque d’assurance, et confirmaient que plusieurs ont perdu leurs points de repère, et ne savent plus sur quel pied ils doivent (ou ne doivent pas) affirmer leur « nationalité ».

Racisme systémique et sémantique

Depuis le mouvement « Black Lives Matter », la peur de passer pour des racistes et des fascistes génère des comportements erratiques et autocratiques chez certains individus, alors qu’on exige souvent de nos politiciens qu’ils confessent (et déclarent) un racisme systémique unilatéral. Il y a même des grands penseurs (et petits faiseurs), « étymologues créatifs » de grand chemin qui ont élaboré des définitions sur mesure pour pouvoir (enfin) faire porter un bonnet d’âne blanc, au plus grand nombre de gens possible.

Ce mouvement (BLM), à la base essentiel, pour allumer des lumières tragiquement éteintes sur un racisme incompréhensible, qui perdure encore partout, a eu un effet quelque peu pervers sur le spectacle de la Saint-Jean.

Le Québec n’est pas les États Unis… et il ne le sera jamais, mais vous savez, quand on entend la coanimatrice dire en conclusion de spectacle qu’elle veut un Québec « plus vrai et surtout, plus juste », c’est une insulte à notre bienveillance collective, majoritaire et notoire. Qui plus est, quand j’ai entendu son comparse animateur changer les mots de la chanson de Plume Latraverse, et lancer qu’on était « sur des terres non cédées », ç’a vraiment été la cerise sur le sundae.       

Feu de paille ultra léché

Je suis fortement déchiré par un spectacle qui a offert une mise en scène grandiose sur le plan visuel et sonore, mais par moments insipide dans son contenu. Quand ce qui retient l’attention d’un spectacle c’est la barbe d’un Néo-Brunswickois, et la performance de quelques artistes qui seront aussi sur une scène le 1er juillet, je me dis qu’on a peut-être négligé certains détails et manqué de sensibilité.

Je suis déçu de l’aplaventrisme systémique, déçu aussi de certains moments d’autoflagellation et de culpabilité, où l’on a préféré tabler sur notre anxiété et nos points à améliorer plutôt que sur nos qualités. Notre fierté d’être ouverts sur le monde, nos valeurs d’entraide et de solidarité, à travers lesquelles nous n’avons jamais eu l’habitude d’user de crayons à colorier lorsqu’il s’agit d’égalité – les a-t-on oubliés ?    

On a chargé le spectacle d’artifices, amené un conteneur de merveilleux d’artistes, mais tout parié sur une diversité qui a fini par diluer l’authenticité. On n’a misé sur nos travers et parler en sous-entendus de multiculturalité, alors que l’on est reconnu et fiers de l’inclusivité de notre précieuse multiethnicité. Peu importe l’allégeance politique, la fête « Nationale » est celle de tous les Québécois, ceux fiers de l’être, fiers de leurs spécificités, de leur nationalité dont le dénominateur commun n’a jamais été la ceinture fléchée, mais bien une culture forte composée de valeurs sacrées.

Je n’ai jamais fait de distinction quant au sexe, à l’origine ethnique, à l’orientation sexuelle ou à la couleur de peau, dans la vie comme en regardant un spectacle. Je m’explique mal le fait que l’on m’a peint un Québec ségrégé, un dans lequel j’ai eu peine à m’identifier. Est-ce un appel formel à redéfinir notre identité ?

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