Arts visuels : De visu, une exposition fascinante et nécessaire
Par Rédaction
Par Joëlle Currat
L’exposition De visu de l’artiste Frédéric Lavoie rassemble ses observations de la biodiversité au travers de films expérimentaux. Au Musée d’art contemporain des Laurentides (MAC LAU) à Saint-Jérôme jusqu’au 11 mai 2025.
Cette exposition portant sur le travail récent de Frédéric Lavoie nous rappelle que la nature, sa faune et sa flore, est la plus belle des œuvres d’art. Alors que le déclin des populations d’insectes nécessaires à notre survie est confirmé par de nombreuses études, les installations vidéo de cet artiste nous font voir certaines espèces filmées au ralenti et en gros plan. L’ajout d’une narration à la première personne du singulier nous rappelle que ce sont des êtres vivants à part entière : on les voit naître, se rencontrer, vivre leur vie.
L’exposition comprend également une vidéo intitulée Funfungi, où l’artiste filme de très près et au ras du sol des champignons aux formes étranges. On y découvre aussi 24 spécimens de plantes vasculaires issues des planches originales de l’Herbier Marie-Victorin.
Un artiste-naturaliste
Invité par Jonathan Demers, le directeur général et chef de la conservation du MAC LAU, Frédéric Lavoie est souvent défini comme un artiste-naturaliste. Né à Montréal en 1976, il est le détenteur d’un baccalauréat en anthropologie et d’une maîtrise en arts visuels et médiatiques. Ses travaux portent essentiellement sur des enjeux reliés à l’écoute et l’observation, et aux rapports entre la nature et la culture.
On compte parmi ses œuvres des vidéos présentées en galeries, en centres d’artistes et dans des musées, et un long-métrage intitulé La Nature contre-attaque (2019). Il a également été choisi comme artiste en résidence au Jardin botanique de Montréal.
Issues d’expéditions en forêt, de résidences scientifiques, de cueillettes, de captures et de captations in situ, les pièces qui composent l’exposition De visu témoignent d’un important travail de collecte de spécimens, afin d’en répertorier les formes, les couleurs, les espèces et les fonctions pour les assembler et les articuler dans de nouvelles compositions.
Plus vrai que nature
La vidéo Insecta Mundi, Je suis l’animal de la forêt, de l’exposition De visu de Frédéric Lavoie impressionne tout d’abord par sa qualité. Tourné en 4K – un format d’image numérique de très haute définition – dans la nature et aussi en studio, le film nous hypnotise et semble nous faire entrer dans un univers parallèle. Pour créer ces images, des insectes ont été capturés, filmés et ensuite relâchés. Elles ont parfois été retouchées par ordinateur et des aplats de couleur y ont été rajoutés, ce qui contribue à leur donner une dimension artistique.
Dans une autre salle où sont présentées des vidéos de nyctales, une espèce de rapace nocturne, trois écrans ont été placés en hauteur, nous donnant l’impression que ce sont elles qui nous observent. En tant que spectateur, on ne peut que contempler et admirer ces chefs-d’œuvre naturels magnifiés par le regard de l’artiste, nous plaçant ainsi dans une position d’humilité.
Une collection de livres
Dans une des salles de l’exposition, le public peut consulter sur place les livres dont s’est inspiré l’artiste Frédéric Lavoie, dont Flore laurentienne, du frère Marie-Victorin, Walden ou la vie dans les bois, de Henry David Thoreau, et d’autres ouvrages traitant des champignons sauvages, des arbres et des espèces d’oiseaux du Québec. L’artiste tient à sensibiliser la population aux richesses de notre environnement et à lui permettre de reconnaître et de nommer les différentes espèces et spécimens.
Archiver l’éphémère, de Boréal Art Nature
Dans une autre salle du MAC LAU, une exposition permet de découvrir les archives du Boréal Art Nature (1988-2013). Ce centre d’artistes implanté dans les Laurentides a été fondé en 1988 par Jeane Fabb et Daniel Poulin et a poursuivi ses activités jusqu’en 2013.
Après l’exposition Exploration dans la mémoire de Boréal Art Nature qui s’est terminée le 19 janvier, cette nouvelle initiative regroupe les documents administratifs et visuels du centre. Elle permet de comprendre l’héritage de cet important acteur de l’art environnemental, performatif et éphémère au Québec. « Le musée a rapatrié et fait l’acquisition de toutes les archives reliées au travail des artistes de ce groupe dans un but de conservation, indique Elizabeth Lauzon, gestionnaire des collections et conservatrice adjointe du MAC LAU. Celles-ci seront ensuite classées et mises à la disposition des chercheurs. »
Pour quelles raisons avoir programmé ces deux expositions en même temps ? « Un fil conducteur relie souvent nos expositions entre elles. De visu et Archiver l’éphémère, de Boréal Art Nature, traitent des mêmes thèmes : la nature, la forêt et la création sur le terrain », répond Mme Lauzon.