(Photo: Archives)

Plus de 9 300 étudiants pourraient être privés de transport

Par Luc Robert

À moins de deux semaines du retour en classe, le tiers des contrats liant les transporteurs d’élèves et le Centre de services scolaire de la Rivière-du-Nord (CSSRDN) n’auraient toujours pas été renouvelés.

Plusieurs éléments laissent présager des turbulences lors du retour en classe.

Selon une source au cœur du dossier, mais requérant l’anonymat, aucun des sept transporteurs de la région n’acceptera de rouler à perte cet automne.

« On a avisé dès juin dernier le CSSRDN que nos contrats de transports échus doivent être bonifiés. Ils viennent de nous appeler le lundi 15 août pour nous refuser une négociation en comité, comme nous l’avons toujours fait par le passé. Nos frais ont augmenté de 40 % et ils ne veulent rien entendre. Leur réponse a été qu’ils possèdent nos listes de prix de soumissions en main et qu’ils regarderont ailleurs. Ce n’est pas vrai qu’avec la hausse du diésel à 2 $ le litre, on va opérer pareil. Il est minuit moins une pour la rentrée 2022 », a prévenu notre interlocuteur.

Ce dernier s’insurge de la tournure des événements. « Il n’y a pas de discussions. Faudra-t-il qu’une compagnie fasse faillite pour que le CSSRDN comprenne ? Ils sont immoraux : voilà des années qu’ils étaient en déficit, et là, ils nous pellettent ça sur le dos. Nous sommes des entreprises privées. Il faut un minimum de profits pour survivre. Leur réponse ? Ils menacent de nous envoyer l’UPAC ! Voyons-donc : sortez de votre tour d’ivoire. »

Les transporteurs demandent des hausses de tarifs pour pallier les hausses des coûts de carburant, d’entretien des autobus et de la main-d’œuvre. Les chauffeurs veulent aussi des meilleurs salaires, qui sont présentement de 20 000 $ en moyenne. De plus, l’obligation depuis novembre dernier de mettre sur la route des nouveaux d’autobus scolaire entièrement électriques augmente aussi les frais des transporteurs lors des achats pour renouveler leur flotte.

« Certains ne veulent même plus soumissionner pour de nouveaux contrats, qu’ils estiment à perte. Pour les transporteurs, l’électrification des véhicules scolaires veut dire défrayer 50 000 $ supplémentaires par autobus mis sur la route. C’est invivable », soutient un autre transporteur.

Santé et sécurité

Les transporteurs avisent que d’autres enjeux demeurent en suspens. « La COVID a le dos large. Il n’y avait pas tant de chauffeurs infectés que ça, depuis deux ans. Mais là, le masque n’est plus obligatoire, pas plus que la désinfection des autobus. Il y aura plus d’absences de chauffeurs, quand on reviendra en classe, si les négos peuvent aboutir. »

Notre source déplore aussi des consignes émises envers les transporteurs. « Dans les minibus, on ne peut pas aller à plus de 5 passagers à besoins spéciaux, assis à l’arrière. Les autorités nous ont demandé de briser une loi sur la santé et la sécurité au travail : ils veulent qu’un sixième passager soit assis en avant, à côté du conducteur. Ils nous pellettent encore une mesure insensée, sans tenir compte de la sécurité de tous et toutes. On ne peut pas conduire et faire de la discipline, surtout pas quand un étudiant particulier risque de t’exploser au visage, à deux pieds de toi. »

Les autorités ont indiqué que le programme d’aide financière destiné aux chauffeurs d’autobus s’élève à plus de 35 millions de dollars en 2022-2023.

L’aide accordée à la transition pour l’électrification s’élève à plus de 7,7 millions de dollars. L’indexation associée au carburant s’élève à plus de 38,5 %, alors que celle liée aux autres dépenses est établie en fonction de l’IPC-Québec, à 5,8 %. Localement, 100 contrats sur 300 seraient en jeu dans Rivière-du-Nord, alors que 6 000 sur 11 000 le seraient à l’échelle provinciale.

Hausses démesurées ?

Du côté du CSSRDN, on invoque une négociation difficile avec les transporteurs.

«Comme la majorité des centres de services scolaires du Québec, le CSSRDN fait face à cet enjeu (contrats à renouveler) à l’heure actuelle, et ce, pour environ le tiers de ses contrats. Les transporteurs réclament une hausse des prix pour le renouvellement de leurs contrats, une hausse qui dépasse largement les bonifications ministérielles reçues par le MÉQ pour renouveler ces ententes. Les négociations des contrats de transport scolaire échus sont toujours en cours. Nous avons bon espoir de trouver un terrain d’entente d’ici la rentrée scolaire», a souligné Mme Mélanie Dufort, coordonnatrice aux communications du CSSRDN.

Rupture de service pour 9 300 élèves ?

Si l’impasse perdure entre les deux clans, des circuits d’autobus pourraient être compromis.

«S’il n’y a pas d’entente, le CSSRDN serait dans l’impossibilité d’offrir le transport scolaire à environ 9 300 élèves à la rentrée scolaire, ce qui représente 52% des élèves transportés. Advenant que l’impasse subsiste, les parents seront informés dès que possible des impacts à prévoir. Leur collaboration serait alors sollicitée, afin d’assurer le transport de leur enfant entre l’école et la maison. Entre-temps, nos équipes sont à pied d’œuvre pour trouver des solutions qui permettront d’atténuer les conséquences d’une telle situation, que nous espérons toujours pouvoir éviter. Pour le moment, il est trop tôt pour savoir si des circuits d’autobus ne pourront être complétés en raison de la pénurie de chauffeurs. Nous l’apprenons souvent la journée même. Comme l’an dernier, les parents touchés seront informés par courriel dès qu’une telle situation est connue. Également, notre section dédiée du site Internet sera mise à jour quotidiennement dès la rentrée et fera état de l’annulation de circuits lorsque la situation le requiert.»

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