(Photo : Simon Cordeau)
Suzanne Marcotte, vice-présidente de HAL.

Préserver l’histoire, ça prend du temps

Par Simon Cordeau

Les sociétés d’histoire sont essentielles pour préserver notre mémoire collective, mais elles dépendent de bénévoles passionnés et dévoués. Pour Suzanne Marcotte, vice-présidente d’Histoire et Archives Laurentides (HAL), cela fait 25 ans qu’elle donne son temps à la préservation de notre patrimoine. Et la Fédération Histoire Québec vient de l’honorer en lui décernant le prix de bénévolat Honorius-Provost.

« J’étais vraiment très émue, d’autant plus qu’Honorius Provost a fondé l’Association des archivistes du Québec. Et je suis archiviste professionnelle. Donc c’est un double honneur, je vous dirais », confie-t-elle en entrevue. Mme Marcotte a été présidente de la Société d’histoire de la Rivière-du-Nord (ancien nom d’HAL) pendant 22 ans. Elle a aussi travaillé pendant 37 ans comme archiviste à la Ville de Saint-Jérôme.

« J’ai toujours eu une passion pour l’histoire et le patrimoine. Mon père était un excellent conteur, mon grand-père aussi. Mon père a toujours été très impliqué, plus au niveau des loisirs sportifs que culturels. Mais voir quelqu’un impliqué dans sa communauté, ça donne le goût aussi. »

Protéger la mémoire

HAL est un service d’archives privées agréé et reconnu par Bibliothèque et Archives nationales du Québec (BAnQ). « Je voulais qu’il y ait une permanence. Ces archives-là, c’est toujours inquiétant quand ce ne sont que des bénévoles qui s’en occupent. Ça peut partir du jour au lendemain. » C’est pourquoi Mme Marcotte a consacré 15 ans d’efforts pour obtenir cette accréditation.

L’organisme peut donc recevoir et protéger des fonds d’archives privés. « On offre aux donateurs la garantie que leurs archives seront traitées selon les normes de BAnQ. Ça ne va pas dormir indéfiniment sur des tablettes. Ça va être traité, codifié, organisé. Il va y avoir un inventaire, un plan de classification. On va numériser ce qu’il y a de plus fragile ou le plus important. »

L’objectif, bien sûr, est aussi de diffuser ce contenu, par des expositions et des publications, et de le rendre accessible à la consultation et à la recherche. « Quand les gens font don d’un fonds d’archives, c’est toute la communauté qui en profite », illustre Mme Marcotte.

HAL possède les fonds de journaux régionaux, comme L’Écho du Nord, Le Mirabel, La Vallée et une partie du Nord. Elle a aussi les archives de la compagnie Rolland, une partie du fonds d’archives de Claude-Henri Grignon et celui de la famille Prévost, par exemple.

L’organisme bénéficie d’une subvention pour financer ses activités, mais celle-ci est quand même « minime », déplore l’archiviste. « On offre les services de notre archiviste à d’autres sociétés d’histoire, à des organismes du patrimoine, à des municipalités. C’est la seule façon d’y arriver. » Par exemple, Prévost a mandaté HAL pour une recherche historique et iconographique, en vue de son 50e anniversaire.

Parmi ses autres accomplissements, Mme Marcotte cite la reconnaissance du curé Labelle comme personnage historique, aux niveaux provincial et fédéral. Cela a nécessité deux ans de travail pour chaque reconnaissance. « Sa reconnaissance au niveau municipal, j’en suis fière aussi, mais ç’a été moins laborieux. »

« On devrait avoir autant d’attachement pour notre patrimoine qu’on en a pour notre langue. Et on devrait le défendre avec autant de ferveur. Ça nous représente ! C’est aussi important ! Ça fait partie de nous, de notre culture, de notre histoire. »

Se raconter

Aussi, Mme Marcotte est particulièrement fière des récits de vie qu’HAL collecte. Tout a commencé lorsqu’elle a livré les souvenirs de sa première communion, en 2017, au Musée de la mémoire vivante de Saint-Jean-Port-Joli. « J’ai amené mon voile, mon petit livre de catéchisme, mon chapelet. Ils ont photographié et numérisé tout ce que j’ai apporté. Ils m’ont filmée. Après, j’ai visité le musée. Il y avait plusieurs postes. On pouvait écouter des vidéos qui provenaient d’un peu partout au Québec. »

Revenue à Saint-Jérôme, elle en parle au conseil d’administration, qui est emballé par le projet. Depuis 2017, HAL a donc enregistré une centaine de témoignages, dont la plupart sont diffusés en ligne. « On est allé interroger les Canots Nor-West, avant qu’ils passent au feu. C’était presque prémonitoire », donne-t-elle en exemple.

« Les récits de vie font partie du patrimoine vivant. Ça m’interpelle tellement. On peut faire des liens : avec des événements, des usines, des bâtiments patrimoniaux. Ce que je trouve extraordinaire dans l’histoire, ce sont tous les liens qu’on peut créer. »

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