Mirabel : Entraide entre deux cabanes à sucre familiales voisines
Par Luc Robert
Dans le secteur de Sainte-Scholastique, les cabanes à sucre Au pied de l’Érable, ainsi que sa voisine de la famille Éthier, forment un clan tissé serré depuis bientôt quatre générations.
Ces établissements du rang Saint-Vincent de Mirabel ont conservé leur lustre d’antan, au grand plaisir des adeptes de repas traditionnels du printemps.
« On a gardé ça aux dimensions de cabane moyenne d’époque, comme l’exploitait mon grand-père Réjean Éthier. On entaille 1 500 érables, dans le respect des règles et de la nature. J’ai commencé à m’impliquer là-dedans à 11 ans et j’espère que mes enfants suivront », a souhaité tout haut le petit-fils, Étienne Ladouceur.
Étant nés eux-mêmes de parents acériculteurs, Carole Éthier et Daniel Ladouceur ont vécu tous les printemps à la cabane familiale. Ils ont transmis leur passion à la génération suivante, celle d’Étienne et de son épouse Nathalie Degrasse.
« C’est en 2014 que mon grand-père Réjean Éthier a décidé de vendre. À ce moment-là, mes parents Carole et Daniel, ainsi que ma conjointe Nathalie et moi, avons font l’acquisition d’Au Pied de l’Érable. Cela a été un immense privilège de pouvoir bouillir l’eau d’érable aux côtés de mon grand-père dans ma jeunesse, d’apprendre son savoir-faire et de partager des moments uniques avec lui. J’ai eu de belles discussions de l’UPA et du CIAC, autour d’une bonne toque de tire », a-t-il poursuivi.
Avec bientôt la quatrième génération se perpétuera le savoir-faire en production de sirop d’érable et des savoureuses recettes des grands-mères.
« On a eu jusqu’à 22 employés saisonniers, puisque nous sommes ouverts 2 mois par année, selon les règles du MAPAQ en zone verte. Mes parents sont âgés dans la mi-soixantaine et continuent à s’amuser, mais ils songent éventuellement à passer le flambeau. Nous demeurons partenaires, mais je vais possiblement racheter avec Nathalie incessamment. »
Si les boîtes de repas et le programme « Ma cabane à la maison » ont permis de limiter les pertes en pandémie, Étienne Ladouceur avoue que le retour en salle à manger l’a rassuré.
« Les commandes à emporter ont amoindri les pertes, mais ce n’était pas l’idéal. On a fait le bon choix de rouvrir la salle à manger, mais pas à pleine capacité. »
Et Étienne de poursuivre : « On fait ça par passion. Je travaille dans la construction et ma femme dans la comptabilité. On n’a pas de projets de grandeur, mais on veut encore améliorer notre qualité », a souligné le jeune dans la quarantaine.
Parmi les améliorations, la récolte de l’or doré est passée à la tubulure en 2008.
« On a connu un essor graduel. Avant 1991, il n’y avait pas d’eau courante à la cabane. La même année, on espérait produire du sirop plus clair. Les chaudières galvanisées le rendaient foncé. En optant pour des chaudières en aluminium, on a trouvé la texture voulue. »
Retour d’Émilie
À quelques pas de là, l’oncle Sylvain Éthier se trouve aux commandes de la cabane à sucre de la Famille Éthier.
« Il faut croire que j’étais destiné à suivre les traces de mon père Réjean. Je suis né un 15 avril, en pleine saison des sucres, dans la maison familiale. Aussi loin que je me souvienne, la famille était impliquée dans les activités. Nos cousins Pierre et Yves Lafrance avaient démarré la cabane avant nous. La petite cabane originale se trouvait à 15 arpents du chemin », s’est souvenu M. Éthier.
À 63 ans, il n’a pas l’intention de lâcher le morceau.
« J’ai 3 200 entailles à faire, en plus des 1 500 d’Étienne, très occupé à sa cuisine. Avec ma sœur Carole, ils font un bon travail. Ça va bien avec les tubulures, mais j’ai aussi connu l’époque des chaudières. Disons que j’ai déjà eu une vingtaine d’employés, mais présentement, on se concentre sur les commandes à sortir. La main d’oeuvre est rare et on ne veut pas se brûler », a souligné celui qui se spécialise dans les toitures en métal hors-saison.
Sous la férule de sa mère Germaine Cousineau et de sa femme Johanne Bélisle, la cabane Famille Éthier a offert jusqu’à quatre services de repas par jour, rappelle Sylvain.
« Le monde veut encore fréquenter la cabane traditionnelle. On sent une forte demande. Ma fille Émilie Éthier déménage sous peu dans la maison de mon père Réjean. Qui sait, mes trois petits-enfants prendront-ils eux aussi la relève ? Déjà, ils viennent faire leur tour et adorent le social », a-t-il confirmé d’un ton prometteur.