Le féminisme dans les yeux d’une élève de 16 ans
Par Ève Ménard
Dans le cadre de la Journée internationale du droit des femmes, nous avons voulu questionner différentes générations sur leur vision de la condition féminine, en 2023.
Rafaëlle Nantel, 16 ans, est en 5e secondaire à l’École Augustin-Norbert-Morin. Elle nous donne sa vision du féminisme et se positionne sur quelques enjeux contemporains
C’est quoi le féminisme pour toi?
Pour moi, le féminisme, ce sont les valeurs qu’on peut partager entre personnes, et qui donnent une voix aux femmes dans différentes situations.
Dans un contexte où tout le monde peut se revendiquer femme et où on déconstruit les identités de genre, c’est quoi être une femme?
Pour moi être femme, c’est juste le fait de se sentir femme. Je pense que tout le monde peut se revendiquer femme, que ce soient des gens trans, par exemple. C’est vraiment à l’intérieur de nous, je pense qu’on le sait.
Quand tu passes du temps sur les réseaux sociaux, que tu es bombardées d’images d’influenceurs, de filles de ton âge ou de femmes plus vieilles, comment te sens-tu?
Avant ça pouvait être plus difficile parce qu’on a toujours l’habitude de se comparer les uns aux autres. Mais je pense qu’en grandissant, je réalise que c’est bien comment tu es. Nous n’avons pas tous les mêmes avis ou les mêmes valeurs. Ça parait juste dans les comportements et dans la vie en général. Il ne faut pas se sentir mal de qui on est, parce qu’on est tous différents.
Est-ce qu’il existe pour toi, et pour les femmes en général, des standards ou des normes de beauté à atteindre?
Ah c’est sûr et tu le sens toi-même. C’est déjà arrivé à tout le monde je pense de se dire «je ne peux pas sortir de chez moi comme ça, je ne suis pas correcte ». Avant, je n’arrivais vraiment pas à aller à l’école sans me mettre de mascara. J’avais l’impression d’être cernée ou de paraître fatiguée. Mais je pense qu’au fond, tout le monde s’en fou un peu d’à quoi te ressembles. On a besoin de normaliser davantage la beauté au naturel.
Au final, les réseaux sociaux, est-ce négatif ou positif pour l’image corporelle et l’estime de soi des jeunes filles?
Je crois que c’est un peu négatif pour l’estime de soi ou pour l’image corporelle. Il faut faire des nuances c’est sûr. Mais je crois que plus on est exposé jeune à tous les réseaux sociaux, et moins c’est bon pour la confiance en soi. Il faut se rendre compte que les réseaux sociaux, ce n’est pas la réalité. On peut tellement cacher des choses, ajouter des filtres. Il faut y avoir une certaine gestion. Les parents doivent faire attention, je pense, à ce que les jeunes filles voient.
As-tu déjà envisagé avoir recours à la chirurgie esthétique?
Non, jamais.
Si une amie ou une personne de ton entourage souhaitait y avoir recours, comment verrais-tu ça?
Je ne le vois pas nécessairement négativement. À un moment donné, tout le monde fait ce qu’il veut avec son corps. La chirurgie esthétique, je le vois davantage pour résoudre des plus gros problèmes d’ordre médical. Mais si une personne a besoin de la chirurgie esthétique pour se sentir bien, je ne vois pas nécessairement ça de manière négative.
Les garçons que tu côtoies au secondaire, comment expriment-ils leur masculinité?
Je pense que ça dépend vraiment. Je n’aurais pas une seule description de la masculinité.
Ça serait quoi pour toi, une masculinité positive?
Je ne sais pas s’il y a une masculinité positive, mais je pense qu’il y en a une négative. Ça renvoie à tout ce qui du rejet de choses considérées comme stéréotypement féminin. Je pense qu’il faut juste être dans l’acceptation.
Aussi, pour moi, la masculinité négative, c’est vraiment vis-à-vis le regarde de la société. Par exemple, des gens vont dire qu’ils ne peuvent pas faire ça, parce qu’ils sont un gars. Je pense qu’il faut passer par-dessus ça. C’est un des gros problèmes que je vois, surtout au secondaire. Parfois, je vais même avoir moins de plaisir à côtoyer des garçons, à cause de ça.
As-tu des exemples concrets de ces comportements plus négatifs autour de toi?
J’ai fait beaucoup de sport, jeune, dans des équipes mixtes. J’ai toujours eu des remarques, ou on ne me faisait pas de passes parce que je suis une fille. Et avec le temps, je pense que c’est quelque chose qui est venue plus m’irriter. Cette masculinité-là j’ai tendance à plus la repousser, c’est moins quelque chose qui me rend à l’aise.
Quelle sera la prochaine lutte ou la lutte à poursuivre pour les femmes?
Je pense qu’il faut continuer d’encourager les filles dans le sport et dans certaines professions, et dans leurs projets. Il faut les encourager à voyager, à faire des choses, et à les faire pour elles-mêmes et à être fières d’elles.