(Photo : Simon Cordeau)

À la cueillette de champignons sauvages

Par Simon Cordeau

Sous les forêts flamboyantes de l’automne se cachent des merveilles culinaires que Guylaine Duval prend plaisir à cueillir. Dans ses cours et dans son livre Guide d’initiation aux champignons sauvages du Québec, elle enseigne comment dénicher, identifier puis déguster sans risques ces trésors forestiers.

Pour se rendre chez Guylaine, il faut suivre un long et étroit chemin de gravelle qui s’enfonce dans la forêt laurentienne. Perché sur une colline, sa chaumière a une vue imprenable sur les montagnes multicolores. Lorsque j’arrive, Guylaine prépare les champignons sauvages cueillis durant son cours, sur une petite cuisinière dehors, juste à côté de son grand jardin. Près du bois, les participants cueillent des feuilles de marguerite sauvage pour la dégustation à venir.

Cela fait au moins 30 ans que Guylaine Duval donne des cours d’initiation aux champignons sauvages. Certains viennent pour apprendre eux-mêmes à reconnaître les champignons qu’ils pourraient cueillir. D’autres sont là pour l’aspect culinaire de l’expérience. « J’ai reçu des gens de l’Institut de tourisme et d’hôtellerie du Québec (ITHQ) cette semaine », raconte Guylaine. D’autres encore viennent simplement pour passer une belle journée en forêt.

Mycologie sauvage

Les champignons apparaissent dès le printemps, et chaque espèce a sa saison de prédilection. Mais c’est vraiment à l’automne qu’ils sont le plus nombreux, explique la mycologue. Plus il y a d’humidité, plus il y aura de champignons. Le manque de pluie des dernières semaines, toutefois, a réduit la quantité cette année.

Ni des végétaux, ni des animaux, les champignons sont leur propre royaume du vivant. Il y a donc une prodigieuse diversité de formes et de couleurs. Certains sont dangereux pour la santé, voire mortels. Plusieurs sont inoffensifs, mais sans aucun intérêt culinaire. Et dans ceux que Guylaine cueille, chacun a ses particularités qui le rend unique : croustillant, mou ou juteux; chapeau dodu ou arborescent comme un corail; goût de viande, parfumé ou finale piquante… La complexité des goûts, des textures et des odeurs délecte les sens.

Même après 30 ans à ratisser les bois, il arrive encore à Guylaine de faire de nouvelles découvertes : des champignons inconnus qu’elle n’a jamais vus avant. « Il y a 3 000 espèces de champignons au Québec. Je ne les connais pas toutes! »

Bien identifier avant de manger

Avec toute cette diversité, et le risque bien réel d’empoisonnement, il est très important d’identifier les champignons cueillis avant de les consommer. Il ne suffit pas de simplement les comparer avec une photo dans un manuel. Les mycologues ont tous une méthode d’identification, développée par l’expérience et assez minutieuse pour éviter les erreurs.

Guylaine Duval présente la sienne dans ses cours et dans son livre Guide d’initiation aux champignons sauvages du Québec. Faire des spories, par exemple, est l’une de ces techniques. Après la cueillette, on place le champignon sur une feuille blanche. Les spores microscopiques se déposeront sur la feuille et, après environ une heure, leur couleur permet d’identifier le champignon, ou de séparer deux champignons semblables. L’habitat dans lequel on retrouve le champignon (les types d’arbres, la nature du sol, etc.) peut aussi révéler son espèce.

Même avec l’expérience et la bonne méthode, il peut arriver à Guylaine d’avoir des doutes. « Si je ne suis pas sûre de mon identification, je ne les mange pas. »

Déguster

Par cet après-midi d’automne, les participants au cours mettent la main à la pâte pour préparer la dégustation. Aujourd’hui, la mycologue est accompagnée d’Andréa Galarneau, horticultrice spécialiste des plantes indigènes. On coupe des herbes et des racines fraîchement cueillies. Une riche soupe de champignons sauvages mijote sur le feu. Un couscous, avec jus de citron, huile d’olive et feuilles de marguerite sauvage, ouvre notre appétit.

Des lanières de divers champignons grésillent dans la poêle. Guylaine les déglace avec du vin blanc, puis ajoute des échalotes hachées, du fromage de chèvre et de la crème. Elle étend le tout sur des bouts de pain qu’elle distribue. Un délice.

Il y a aussi un végépâté maison, et une soupe de « mauvaises herbes », plaisante Andréa, qui réchauffe de la brise automnale, et des échantillons de champignons, et même un sirop en guise de dessert.

Pendant que chacun se délecte de ces découvertes culinaires, je contemple la montagne éblouissante de couleurs. Entre deux bouchées, l’une des participantes lance : « On connaît si peu de choses sur nos forêts laurentiennes et ce qu’elles ont à offrir. »

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