Fille de trans: Le théâtre pour ouvrir le dialogue
Par Ève Ménard
La pièce Fille de trans sera présentée pour la première fois au Théâtre Gilles-Vigneault, le 6 décembre prochain. On y raconte raconte la transition de genre d’un père, du point de vue de sa fille.
À 17 ans, Marie-Claude D’Aoust apprend la double identité de son père : Normand deviendra, au fil des années, Sophia. À l’époque, Marie-Claude tombe dans le jugement. Mais avec le temps, elle chemine et sa pensée évolue. Dans la pièce Fille de trans, Marie-Claude raconte son histoire, dans le but d’ouvrir un dialogue et de faire le pont entre la communauté transgenre et l’ensemble de la société. « Avec le public, on traverse toutes les étapes que j’ai franchies dans l’apprentissage et l’acceptation de cette transition », explique l’auteure de la pièce.
Du texte à la pièce
Après près de trois ans de travail, Marie-Claude est fébrile à l’idée de présenter le résultat final de son projet. Des lectures publiques ont d’abord eu lieu à Saint-Jérôme en 2021 et à Saint-Eustache en 2023. Puis, tranquillement, le texte a été adapté en une pièce de théâtre. Sur scène, Marie-Claude D’Aoust joue son propre rôle. Elle sera accompagnée d’Eric Cabana, qui incarne son père, et d’Audrey Guériguian, qui joue une vingtaine de personnes croisées au fil de leur parcours. L’œuvre navigue entre la narration et le théâtre.
Sophia n’est pas impliquée directement dans le processus de création, précise sa fille. Mais elle est consultée à chaque étape. Elle a lu les textes avant qu’ils soient lus sur scène et elle était présente aux deux lectures publiques. « C’était important pour moi qu’elle soit au courant de ce qui se passe et de ce qui se dit », souligne Marie-Claude. « En même temps, elle a la grande humilité et la grande délicatesse de me laisser raconter les choses comment moi je les ai vécues. »
Présenter du positif dans un contexte polarisant
Dans les dernières semaines, l’identité de genre a suscité des débats partout au Canada. Le sujet est particulièrement polarisant. Bien que cette situation attriste Marie-Claude, celle-ci ne ralentit pas pour autant. « J’ai juste hâte que le projet démarre et qu’on ait l’opportunité de sensibiliser les gens et de peut-être calmer les tensions aussi », dit-elle.
« Les gens oublient parfois qu’on est tous des humains. Avec la pièce, j’ai envie de ramener cette dimension humaine et affective. Pour moi, la transition, c’est un changement dans ma relation avec mon parent et il y a plein de genre qui vivent ces changements-là. Il faut se rappeler qu’on a le droit d’être brusqué ou d’être dérangé, mais qu’on a aussi le devoir humain et social de faire preuve d’ouverture et d’écoute. »
Marie-Claude est la preuve sur « deux pattes » qu’il est possible de cheminer. Et ça lui donne beaucoup d’espoir pour la suite. Justement, l’objectif de la pièce n’est pas de convaincre personne, mais d’entamer une réflexion ou d’ouvrir une brèche. L’auteure croit beaucoup en son projet. « À la suite des deux lectures, des gens du public sont venus me voir et m’ont dit : « Je suis venu à reculons parce que ma femme m’a amené ou parce que ma fille m’a traîné, moi je suis un gars de la construction et je ne comprends rien là-dedans ». Mais ils sont venus me dire qu’ils avaient été émus et qu’ils avaient envie de mieux comprendre, qu’une nouvelle ouverture se créait », raconte-t-elle.
La suite pour Fille de trans
Après une première représentation à Saint-Jérôme, la pièce sera jouée à Gatineau, le 18 janvier. Une tournée québécoise suivra ensuite à l’automne 2024. L’objectif est également de faire la tournée des écoles, pour permettre aux jeunes du secondaire d’assister à la représentation, souligne Marie-Claude D’Aoust.