Clubs de bridge : Apprendre, gagner et socialiser
Par Simon Cordeau
Le Club de bridge de Saint-Sauveur est en péril, avertit l’une de ses administratrices, Gisèle Lavallée. Fondé en 1991, le club ne compte plus que 81 membres cette année, alors qu’il en comptait 164 en 2017. Surtout fréquenté par des retraités et des aînés, le club avait dû cesser ses activités durant la pandémie. Mais beaucoup ne sont pas revenus, lorsque le club a rouvert.
La députée de Prévost et ministre responsable des Aînés, Sonia Bélanger, est d’ailleurs venue rendre visite au club, le 16 octobre, et lui a accordé un soutien financier de 1 500 $. Les fonds serviront à payer un professeur, pour former de nouveaux joueurs. « On a quelqu’un qui a beaucoup d’expérience et de savoir-faire avec une clientèle vieillissante », explique Mme Lavallée.
Le club a déjà trouvé 20 à 25 intéressés qui viennent apprendre le bridge. Lorsqu’ils auront fait leurs classes, ils pourront passer de la section école du club à celle plus compétitive, où s’affrontent tout l’après-midi des adeptes qui jouent depuis longtemps, certains depuis des décennies.
Apprendre à jouer
Le bridge est un jeu complexe. Lorsque je visite le club, je me dis prêt à ce qu’on m’initie. Quelqu’un peut-il me montrer les bases rapidement ? Mais on me regarde avec amusement. « Vous n’avez jamais joué ? »
Le bridge se joue avec un jeu de 52 cartes, comme on en a tous un à la maison. Mais il faut au moins 16 heures de cours avant de commencer à y jouer. Entre autres, il faut savoir analyser les cartes qui nous sont données, connaître les différentes stratégies possibles, et communiquer avec son partenaire avec des codes. Durant la première phase du jeu, les enchères, il faut savoir quels risques prendre. Et durant la seconde phase, il faut être sûr de pouvoir réaliser le nombre de levées qu’on a misées.
Et même si on connait les bases, il y a énormément de nuances et de stratégies à maîtriser. « On se perfectionne encore. À l’infini ! C’est pour ça que c’est passionnant », illustre Denise, l’une des joueuses régulières.
Apprendre le bridge est également très valorisant pour ceux qui y mettent le temps et l’effort, ajoute Mme Lavallée. « On a le sentiment d’être capable. À 55 ans et plus, ça fait longtemps qu’on n’a pas appris quelque chose de nouveau. »
Les règles sont aussi strictement observées. En cas de désaccord, les joueurs peuvent faire appel au directeur, qui sert alors d’arbitre. C’est aussi lui qui prépare les parties avant, et qui envoie les résultats à l’American Contract Bridge League (ACBL) après.
Cet après-midi par exemple, les joueurs joueront tous les mêmes parties, à tour de rôle. Pour chaque partie, les cartes pour chacun des quatre joueurs sont déjà placées dans un petit boîtier. Ainsi, à la fin, les équipes peuvent voir qui a su tirer le meilleur parti de telle ou telle main, en usant d’une stratégie différente.
Socialiser
En plus d’être exigeant intellectuellement, le bridge est aussi une belle excuse pour sortir et socialiser. « On a une membre de 102 ans », souligne Mme Lavallée. Le soutien de nombreux bénévoles, surtout, permet au club d’exister.
« Est-ce que les gens jouent en couple ? », demande Mme Bélanger lors de sa visite. « C’est difficile pour les couples. À l’aller, ça va. C’est en revenant que c’est difficile [rires] », répond une dame venue de Drummondville pour jouer.
Denise et Robert, eux, jouent en couple. C’est d’ailleurs en jouant au bridge qu’ils se sont rencontrés. « Il faut faire confiance à son partenaire. Mais c’est un jeu d’erreurs. Donc on en parle plus après », admet Denise. Même s’ils jouent « juste pour les honneurs », comme le dit Robert, ils veulent quand même gagner. Les stratégies employées et les décisions prises dans le feu de l’action peuvent donc mener à des erreurs… et faire perdre notre partenaire.
Le bridge est aussi une belle façon de passer le temps. Plusieurs joueurs font la tournée des quatre clubs des Laurentides : le lundi à Morin-Heights, le mardi à Saint-Jérôme, le mercredi à Saint-Sauveur, et le jeudi à Prévost. Les joueurs se rencontrent vers 12 h 45, jouent tout l’après-midi, et se quittent vers 16 h 00, lorsque toutes les parties sont jouées. « Il faut jouer souvent, parce qu’on oublie vite », illustre Mme Lavallée.
Certains jouent aussi beaucoup sur Internet, où existe une vaste communauté de joueurs. Denise et Robert soulignent qu’en voyage, le bridge permet souvent de rencontrer des gens de partout dans le monde, au-delà de la barrière de la langue. Comme pour les échecs, par exemple, les règles du bridge sont partout les mêmes.