Nadine Brière
Par Rédaction
Mairesse de Sainte-Adèle
1 – Avez-vous un souvenir précis de l’évènement du 6 décembre 1989, ou en avez-vous entendu parler? Décrivez la situation.
Le 6 décembre 1989, j’avais 11 ans et mon souvenir est très vague pour ne pas dire aucun. Mes parents ont probablement fait comme moi je fais avec mes enfants lorsque je regarde une tragédie aux nouvelles, j’évite le sujet et je ferme la télévision.
En 1989, le Québec tout entier était sous le choc et avec raison, aujourd’hui en 2019, 30 ans après, les tueries sont trop nombreuses. Combien de fois durant une année nous entendons qu’un tireur fou a fait feu sur des inconnus. Comment expliquer à nos jeunes enfants une telle situation ? L’évitement est souvent le trajet le plus simple, le plus primaire parce que comme maman, je veux protéger mes enfants. Je ne dis pas que ma méthode est la meilleure, mais je trouve que nous sommes très mal outillés aux nombreuses questions que nos enfants peuvent avoir. Expliquer l’inexplicable ça relève du surréaliste, mais reste que souvent, je n’ai pas le choix.
2- Qu’est-ce que l’évènement a déclenché chez vous? Quelles sont les émotions ressenties?
Bien qu’on parle de la polytechnique, je vous dirais que je compare cette tragédie aux nombreuses autres que nos voisins américains vivent. Pas plus tard qu’à la mi-novembre, la Californie vivait un autre carnage. À chaque fois, je ressens de la colère. Comment un être humain peut-il être aussi égaré, au point de vouloir enlever la vie des autres?
4- En lien avec l’évènement, comment votre vision de l’éducation des enfants a-t-elle été influencée?
Depuis les nombreuses tragédies que nous entendons dans les dernières années, mon mari et moi avons abordé à plusieurs reprises, le terme de la maladie mentale avec nos enfants. Sans la couverture médiatique des évènements, nous n’aurions peut-être pas eu le réflexe, mais aujourd’hui, il faut faire preuve d’ouverture et de transparence.
5- 30 ans plus tard, quelle est votre perception de la place de la femme dans la société actuelle?
Pour moi, la femme à toujours eu la même place qu’un homme dans la société, mais cette place, je la dois aux nombreuses femmes déterminées avant moi et qui ont fait changer les choses. Je pense sincèrement que les hommes sont plus ouverts d’esprit qu’il y a 30 ou 40 ans. Cette ouverture d’esprit à fait en sorte de changer la perception de plusieurs générations.
7- Comment s’exprime le féminisme d’aujourd’hui à vos yeux? Quelle est sa place?
Je n’aime pas beaucoup le terme féministe, comment voulons nous être égale si encore une fois nous nous mettons une étiquette? Aujourd’hui, je pense que chaque femme comme chaque homme a son mot à dire, peu importe son sexe. Arrêtons de nous mettre des titres et avançons ensembles.
8- Quelle est votre perception des nouvelles expressions du féminisme à travers les mouvements sociaux récents ou actuels (exemple: les mouvements #MeToo et #MoiAussi)?
Le mouvement auquel vous faites mention n’est pas un mouvement féministe selon moi, on parle ici d’un mouvement afin que des victimes (homme ou femme) sortent de l’ombre afin de faire bouger l’opinion publique, afin de faire réaliser que souvent certaines personnes vont trop loin. Soyons réalistes, les victimes d’agressions ne sont pas seulement des femmes alors pourquoi parler d’un mouvement féministe.
9- Avez-vous vécu des réticences ou des traitements différents au cours de votre parcours professionnel parce que vous êtes une femme?
Je suis jeune et je suis une femme donc OUI, être mairesse à 40 ans ça plait pas à tout le monde. Toutefois, je suis fière de mon parcours, je suis heureuse d’avoir franchi la tête haute certains obstacles et avec le temps je fais mes preuves.
Est-ce que le manque de respect que certains ont à mon égard seraient différents si j’étais un homme, je vous dirais que OUI.
Est-ce que le fait que certains hommes me parlent comme si j’étais leur fille et m’infantilisent serait différent pour un jeune maire masculin, je vous répondrais que OUI.
10- Dans un monde idéal, quelle serait votre souhait de société pour les générations futures?
Apprenons à faire confiance aux gens, qu’on parle d’une femme ou d’un homme, d’un jeune ou d’un plus vieux. Soyons ouvert parce que plus souvent qu’autrement, l’ouverture d’esprit fait toute la différence dans notre société. Ne prenons jamais pour acquis quelqu’un et surtout expliquons à nos enfants les conséquences de leurs gestes.