Les Québécois prêts à supporter les agriculteurs pour la réduction des pesticides
Les Québécois seraient prêts à financer l’équivalent de 176 millions de dollars par année aux producteurs agricoles pour qu’ils réduisent leur usage de pesticides. C’est ce que démontre une étude menée par le professeur Jérôme Dupras de l’Université du Québec en Outaouais (UQO).
Le but de l’étude était de savoir si un canal pouvait être développé entre les citoyens et les agriculteurs, une forme de contrat social, pour accélérer la transition éco-logique et la réduction de pesticides. « On voulait voir s’il n’y avait pas des démarches complémentaires qui pourraient s’ajouter à des programmes comme Prime-Vert, à une échelle plus locale et avec moins d’intermédiaires », précise M. Dupras, qui est aussi chercheur à l’Institut des sciences de la forêt tempérée (ISFORT) de l’UQO et titulaire de la Chaire de recherche du Canada en économie écologique.
Près de 2000 répondants dans les régions à vocation agricole ont participé à cette étude. On a observé un fort soutien à l’accompagnement des agriculteurs dans la réduction des pesticides.
Celui-ci se cristallise par une volonté à contribuer à une hauteur de 100$ par année par citoyen. Bien que d’autres caractéristiques et variables aient été enquêtées comme les bandes riveraines et la conservation des sols, une préférence pour la réduction des pesticides est ressortie. Le groupe de chercheurs a aussi étudié les intermédiaires qui pourraient porter de tel programme.
« Collectivement, on est rendu là »
Deux éléments peuvent être dégagés de cette étude en termes d’applicabilité. D’abord, cette volonté à contribuer représente une forme de demande sociale. « Ça m’a montré que collectivement, on était rendu là, et que la dimension environnementale était très importante pour les gens en ce qui a trait au milieu agricole », explique M. Dupras. Dans le Plan d’agriculture durable du gouvernement québécois, c’est 125 millions de dollars qui sont investis sur 5 ans.
« L’étude nous dit qu’il y aurait de la place à en faire encore plus. Par exemple, si le plan voyait son budget augmenté, il y aurait une acceptabilité de la part de la population. »
Aussi, l’étude a démontré qu’il y a de l’espace à des échelles régionales pour des initiatives complémentaires à celles déjà existantes dans les programmes gouvernementaux. « Ça vient mettre la table à l’innovation et la créativité pour voir quelle initiative nouvelle et composée d’une la toile de fond régionale pourrait être mise en place. » Une région précise pourrait donc regarder quelles sont ses problématiques environnementales liées à l’agriculture dans son territoire. « Ça ouvre une porte intéressante. »
Être bien accompagnés
Bien que cette étude démontre un soutien de la part des Québécois, les agriculteurs sont-ils prêts à faire ce virage sans pesticides ? « C’est là toute la complexité », soutient M. Dupras. Selon lui, il faut d’abord augmenter l’accompagnement par des agronomes qui sont, par exemple, liés au gouvernement et ayant un mandat spécialisé en agroenvironnement.
Certaines cultures intensives, comme le soya ou le maïs, nécessitent un changement drastique de la pratique pour en arriver à un contrôle biologique. Cela prend du temps, voire des années, avant de retrouver la santé des sols.
« D’où l’importance d’offrir de bons accompagnements, mais aussi des enveloppes conséquentes à l’ampleur du défi. »
« Ce que je remarque sur le terrain, c’est qu’il y en a de plus en plus d’agriculteurs qui font le virage, qui sont sensibilisés ou qui veulent faire quelque chose. »
Ainsi, l’ajout de bons programmes et d’initiatives locales serait important pour les accompagner.