La pandémie sans Internet haute vitesse
Par Simon Cordeau
Avec le télétravail, l’école à distance et les soirées virtuelles entre amis, Internet a pris encore plus de place dans notre quotidien. Mais pour bien des Laurentiens, la réalité est tout autre. Des résidents de Saint-Adolphe-d’Howard, de Prévost et de Saint-Hippolyte font partie des 250 000 derniers foyers québécois à ne pas être branchés à Internet haute vitesse.
Line Légaré est présidente du Comité Internet haute vitesse de Saint-Adolphe-d’Howard, formé à l’automne dernier. « On attend actuellement les annonces du gouvernement, pour savoir quels projets seront acceptés, quelles prochaines cohortes de gens seront branchées. »
En campagne électorale, François Legault a promis que tous les foyers québécois seraient branchés d’ici la fin de son mandat, en 2022. Il a réaffirmé cette promesse à plusieurs occasions depuis le début de la crise.
Mais pour les concitoyens de Mme Légaré, qui traversent la pandémie sans accès Internet rapide, abordable ou même stable, c’est trop long. « Des personnes paient beaucoup plus cher par mois, parce qu’ils dépassent leur forfait de données. Des étudiants sont obligés de retourner à leur appartement en ville, parce que leurs parents n’ont pas d’accès Internet. Quelques personnes ont réussi, en changeant et en rechangeant de compagnie, à trouver un réseau potable. »
Mme Légaré rapporte que certains résidents ont même quitté la municipalité et que des locations de chalet ont été annulées.
Bornes wifi
Pour pallier au problème, des bornes wifi sont rendues disponibles à Saint-Adolphe-d’Howard. Grâce à une subvention provinciale, des refuges Internet sont mis sur pied au Mont-Avalanche, à la bibliothèque, au Pavillon Montfort et, bientôt, au Centre de plein air. Les places sont toutefois limitées, distanciation oblige, et une réservation est obligatoire. Une personne sur place s’assure aussi que les consignes sanitaires soient respectées.
Un long chantier
Charles Gosselin, directeur des Affaires gouvernementales chez Bell, rappelle que brancher les Québécois à la haute vitesse était un projet d’envergure.
« Il y a environ 4 millions de résidences dans la province. Les projets de réseau à large bande, avec la fibre optique, ont débuté en 2010-2011. Depuis ce temps-là, la cadence n’a pas ralenti. C’est un gros et long chantier. »
Il reste 250 000 foyers québécois à brancher. Ces derniers se trouvent dans des endroits difficiles d’accès, en raison de la topographie, ou avec une trop faible densité de résidents, donc l’investissement n’est pas rentable sans aide gouvernementale.
Ce qui retarde ces derniers branchements, selon M. Gosselin, c’est maintenant ce soutien gouvernemental, parce que les demandes doivent être évaluées et approuvées. « Nous avons bon espoir que dans les semaines, les mois à venir, nous aurons des bonnes nouvelles du fédéral, du provincial et du CRTC, que ce soit pour Bell ou d’autres compagnies. »
L’accès aux poteaux
Plusieurs critiques ont attribué les retards à la difficulté d’accéder aux poteaux, dont Bell et Hydro-Québec sont les propriétaires, pour faire passer la fibre optique.
M. Gosselin rappelle que le réseau de poteaux est une infrastructure complexe. « Pour beaucoup de gens, c’est juste un billot de bois planté dans le sol. Mais c’est un véritable ouvrage d’ingénierie, au même titre qu’un pont. » Pour en préserver l’intégrité, des normes ont été établies. « Les normes ont été revues suite au grand verglas de 1998. On veut une infrastructure qui peut résister aux intempéries, qui est pérenne et solide. »
Cela dit, ces normes ont été allégées au cours des derniers mois, et une table de coordination a été créée pour faciliter la communication entre les acteurs concernés. Ainsi, M. Gosselin soutient que l’accès aux poteaux n’est plus un obstacle pour brancher les derniers foyers.