Chômage élevé malgré la pénurie
Par Simon Cordeau
En juillet 2021, le taux de chômage au Canada était de 6,1 %. Au Québec, il s’élevait à 7,8 %. Pourtant, les employeurs peinent à trouver des candidats. Que se passe-t-il? Discussion avec Mathieu Perron-Dufour, professeur au Département des sciences sociales de l’Université du Québec en Outaouais.
Plusieurs facteurs expliquent la divergence entre le nombre de chômeurs et les postes à pourvoir. D’abord, il faut voir le phénomène par secteurs. M. Perron- Dufour donne l’exemple des enseignants au primaire. « Il en manque effectivement un certain nombre. Mais ça prend une formation, et c’est un processus assez compliqué, sans compter que c’est un travail assez demandant et exigeant… » La pénurie ne pourra donc être résolue qu’à long terme.
Certains secteurs connaissent aussi une pénurie temporaire. Par exemple, la multiplication des chantiers de construction peut mener à une pénurie d’électriciens. Mais le temps d’en former des nouveaux, la demande sera probablement essoufflée, illustre le professeur.
Il y a aussi l’aspect démographique. Avec le vieillissement de la population, beaucoup prennent leur retraite. Certains corps de métier ont des travailleurs généralement plus vieux, et sont donc touchés davantage pendant cette transition.
Conditions de travail
Il y a cependant des emplois peu qualifiés que n’importe qui pourrait occuper. Alors, pourquoi restent-ils vacants? « Des employeurs se disent : moi, j’avais des employés au salaire minimum, et j’ai de la misère à en retrouver. Mais il y a un bout de phrase qui manque souvent : j’ai de la misère… aux conditions actuelles », souligne M. Perron-Dufour.
Selon Emploi-Québec, la définition des personnes en chômage est : « Personnes qui étaient prêtes à travailler et qui, au cours des quatre dernières semaines, ont activement cherché du travail, ont été mises à pied temporairement ou n’ont pas cherché activement un emploi, mais devaient commencer un nouvel emploi. »
Ces employeurs offrent les mêmes conditions de travail qu’avant la pandémie, en pensant que la situation actuelle est temporaire. Ils peuvent donc être hésitants à augmenter le salaire, par exemple. « Je pense qu’il y a beaucoup d’employeurs qui se disent : après la pandémie, je serai pris avec les nouvelles conditions. Je finirai bien par en trouver, quand l’économie sera redevenue normale », avance le professeur.
Mais il n’y a pas que le salaire et les bénéfices marginaux. D’autres facteurs ont transformé l’économie, comme le risque de contagion. « Si l’emploi offert est plus dangereux, mais que les conditions ne sont pas tellement meilleures… Comme beaucoup d’employeurs n’ont pas modifié leurs conditions ou leur offre salariale, certains chômeurs décident de pas y aller et continuent de chercher. »
Économie épanouie
Taux de chômage au Québec
Juillet 2019 : 5 %
Juillet 2021 : 7,8 %
Le professeur ne voit pas de problème à ce que les chômeurs prennent le temps de trouver le bon emploi. Bien au contraire. « C’est sain, on ne veut pas que les gens prennent instantanément le premier emploi qu’on leur offre. On veut une économie où les individus peuvent trouver un emploi qui leur convient, dans lequel ils peuvent se réaliser et s’épanouir. Le côté humain est important. »
L’économie s’en trouve enrichie et plus productive, sans compter que les entreprises peuvent mieux retenir leurs employés. « Si on saute sur le premier emploi, il risque d’avoir beaucoup plus de roulement. Et les entreprises se retrouvent à constamment entraîner du nouveau monde. »
1 commentaire
En augmentant le salaire minimum trop rapidement, cela appauvrirait la population générale: Un bon pourcentage des gens à la retraite ont une pension fixe à vie( moi par ex. 800$ à vie avant impôt, non indexable . +RRQ et pension Fed, tout cela après avoir travaillé 45 ans pour la même compagnie). Si on augmente le salaire minimum, tout vas augmenter et les retraités vont beaucoup s’appauvrir… Faut augmenter progressivement car la population est vieillissante. Merci