Accroc : Guérir de sa violence

Par Simon Cordeau

Les hommes violents peuvent-ils guérir ? « C’est un peu comme demander : est-ce qu’une personne peut changer dans la vie ? Ça appartient à cette personne. Si moi, je veux changer, et que je suis prêt à mettre les efforts et l’énergie, et que je prends les moyens pour changer, oui, je peux y arriver », explique Steve Mimeault, directeur général d’Accroc.

L’organisme de Saint-Jérôme aide les hommes qui souhaitent changer leurs comportements violents. « Il n’y a rien qui excuse la violence. Et on est là pour ceux qui veulent s’en sortir », souligne M. Mimeault. « Il y en a qui arrivent à faire beaucoup de changements, d’autres qui n’y arrivent pas. Et entre ça, il y en a qui avancent un peu et qui diminuent leurs comportements », continue-t-il.

Prendre la responsabilité

Avant toute chose, il est important que les hommes prennent la responsabilité de leur violence et de leurs comportements. « Pour venir chez nous, les gens doivent reconnaître qu’ils utilisent la violence. Et qu’ils reconnaissent aussi que c’est un problème », souligne M. Mimeault.

Souvent toutefois, ils vont rejeter la responsabilité sur leur conjointe ou quelqu’un d’autre. « C’est de ta faute si j’ai pogné les nerfs. […] Mais si c’est toi le responsable, moi je n’ai pas besoin de changer. Ça déresponsabilise l’homme, et ça responsabilise la victime de quelque chose qui ne lui appartient pas », illustre le directeur. Il souligne aussi que la violence n’est pas que physique : elle peut être verbale, psychologique, financière, sociale, etc.

Communiquer

La violence est aussi un moyen de communiquer, souligne M. Mimeault, bien qu’il s’agisse d’un moyen inadéquat. « Si dans un souper, je ne suis pas content et que je donne un coup de poing sur la table, je viens de parler. Les gens vont se taire », illustre-t-il. « Mais j’aurais dû dire : la discussion va à une place où je ne suis pas bien. »

Pour changer ses comportements violents, il faut donc reconnecter avec ce qu’on vit et ses émotions, plutôt que « agir mon émotion ». Une des techniques utilisées par Accroc, par exemple, est le temps d’arrêt. Lorsque je perçois les signes précurseurs de la violence, je me retire de la situation, pour prendre le temps de respirer, de réfléchir à ce que je vis et à ce qui s’est passé, avant de revenir de manière calme et sécuritaire, explique l’une des vidéos éducatives d’Accroc.

« Il faut qu’ils apprennent à communiquer sainement. C’est la base. Si je ne suis pas bien ou pas d’accord, c’est relié à une émotion : la honte, la tristesse, la peur, etc. Les gars vont tout transformer en colère. Mais en-dessous, il y a les vraies émotions. » Encore aujourd’hui, être émotif et vulnérable n’est pas valorisé chez les jeunes garçons, et peut même être stigmatisé, déplore M. Mimeault. « Ça donne que le monde émotif des gars est assez pauvre. (…) Au lieu de vivre nos émotions, on les refoule et on les étouffe. » Il compare le phénomène à un presto : si la pression est trop grande, il y a un risque d’exploser, ce qui mène à des gestes ou des comportements violents.

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Parmi ses interventions, Accroc utilise la thérapie de groupe. Ensemble, les hommes échangent et partagent leur vécu. Cette formule ouvre une foule de possibilités, explique M. Mimeault. D’abord, nous avons tous dans nos vies des relations interpersonnelles. « Donc l’histoire de l’un va résonner avec l’autre. » Ensuite, ces échanges aident les hommes à nommer leurs émotions. « Ils apprennent à écouter, aussi. Et ils apprennent que, s’ils ne sont pas d’accord, il y a une façon de nommer les choses. »

Un autre facteur important, c’est la honte. « La honte, c’est un gros moteur de changement », souligne M. Mimeault. Et partager ses comportements honteux est plus difficile devant un groupe que devant un seul intervenant. Mais il y a aussi, dans le groupe, des hommes qui sont rendus à différents endroits dans leur cheminement, certains qui ont changé et certains qui nous ressemblent. « Je ne suis pas tout seul là-dedans. Je me reconnais. Et il y a des solutions », illustre M. Mimeault.

Il donne l’exemple d’une victime d’abus sexuels. Elle ne confiera peut-être son histoire à personne, pas même à son psychologue. Mais si quelqu’un dans le groupe partage sa propre histoire d’abus, « moi je ne voulais jamais aller là, mais automatiquement, ça m’amène dans mes propres bébittes ».

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