BMW, Daimler et Volkswagen : tests d’émissions de moteurs diesel sur des animaux
Article par Michel Deslauriers
Le moteur diesel vient de prendre un autre coup, et celui-là pourrait bien être fatal.
Dans le but de prouver que les émissions de moteurs diesel ne posent pas un risque à la santé de la population, les compagnies allemandes BMW, Daimler et Volkswagen, ainsi que l’équipementier Bosch, auraient financé une organisation nommée le Groupe européen de recherche sur l’environnement et la santé dans le secteur des transports. En allemand, elle porte l’acronyme EUGT.
Il y a quelques jours, le New York Times a révélé que l’EUGT aurait embauché des scientifiques pour effectuer des recherches visant à défendre la commercialisation de moteurs diesel, accusés par le World Health Organisation d’émettre des émissions cancérigènes. Une des études s’est déroulée en 2014, dans un laboratoire à Albuquerque au Nouveau-Mexique. Dix singes ont été placés dans une chambre et pendant qu’ils écoutaient des bandes dessinées à la télé, ils inhalaient des vapeurs provenant d’une Volkswagen Beetle TDI.
Toutefois, cette voiture particulière était équipée d’un dispositif de trucage que Volkswagen a admis avoir installé dans une génération récente de leurs véhicules à moteur diesel. En bref, les singes ont inhalé beaucoup moins d’oxydes d’azote que la population, puisque la voiture avait détecté qu’elle subissait un test en laboratoire. Néanmoins, l’étude a jugé non concluante et n’a jamais été publiée.
Selon un article publié sur La Presse, l’EUGT a également commissionné des tests sur 25 humains, en Allemagne, qui auraient volontairement accepté d’inhaler des vapeurs de moteurs diesel. On dit que cette étude n’était aucunement reliée au scandale Dieselgate, mais plutôt effectuée pour mesurer les effets des oxydes d’azote dans un lieu de travail.
Selon un article publié par AFP, des scientifiques allemands auraient cité que « ce type de recherche est effectué sur des humains et des animaux depuis de nombreuses années, afin d’étudier les effets des vapeurs de diesel. » Flemming Cassee, toxicologue pour l’Institut national néerlandais de la santé publique (RIVM), a également précisé « nous faisons ça depuis des années, et ce n’est rien d’extraordinaire. » Il a ajouté que d’autres pays effectuaient également des tests similaires.
Les trois constructeurs ayant financé l’EUGT n’étaient apparemment pas au courant de l’ampleur des études, et condamnent évidemment les tests sur des humains et des animaux.
Volkswagen a émis cette déclaration :
Le Groupe Volkswagen comprend sa responsabilité sociale et corporative, et prend très au sérieux les critiques à l’égard de cette étude menée par l’EUGT. Nous croyons que les méthodes scientifiques utilisées pour effectuer les recherches étaient inappropriées et qu’il aurait été mieux de ne pas les entreprendre du tout. Le Groupe Volkswagen se distance explicitement de toute forme de cruauté animale. Des tests effectués sur des animaux sont tout à fait inconsistants avec nos standards corporatifs. Nous nous excusons pour le comportement inapproprié s’étant déroulé et pour le mauvais jugement des individus qui y étaient impliqués.
Concernant l’affaire en général : le Groupe européen de recherche sur l’environnement et la santé dans le secteur des transports (EUGT, Europäische Forschungsvereinigung für Umwelt und Gesundheit im Transportsektor) avait été fondé comme un institut de recherche indépendant par BMW, Daimler, Volkswagen et Bosch en 2007, tous étant des membres de l’association travaillant comme partenaires égaux. L’EUGT a également commissionné l’Institut de recherche respiratoire Lovelace (LRRI) aux États-Unis pour effectuer l’étude. L’EUGT a été dissolu en date du 30 juin 2017. À ce moment, les résultats finaux de l’étude n’étaient pas encore disponibles, et le projet n’a pas été complété ni publié.
(traduction libre)
De plus, selon un communiqué émis sur le site média du Groupe Volkswagen, le comité de direction a décidé de suspendre Dr Thomas Steg, directeur du groupe des relations externes et de la durabilité.
Daimler (Mercedes-Benz) a émis cette déclaration :
- Nous nous distançons expressément des études et de l’EUGT.
- Nous sommes consternés par la nature et l’ampleur des études et de leur mise en œuvre.
- Nous condamnons les expérimentations dans les termes les plus forts.
- Bien que Daimler n’ait exercé aucune influence sur l’élaboration de l’étude, nous avons lancé une enquête profonde dans l’affaire.
- L’approche de l’EUGT contredit nos valeurs et nos principes éthiques.
- Tout le travail de recherche commissionné avec l’EUGT était surveillé par un comité consultatif de recherche, consistant de scientifiques provenant d’universités et d’instituts de recherche renommés – de la sélection jusqu’à la présentation des résultats.
- L’étude était commissionnée sous la recommandation du comité consultatif de recherche de l’EUGT. (traduction libre)
Le Groupe BMW et Bosch n’ont pas encore émis de déclarations officielles.
Depuis le début du scandale Dieselgate, les moteurs TDI dans tous les modèles Volkswagen, Audi et Porsche vendus aux États-Unis et au Canada ont été retirés, alors que Mercedes-Benz a également éliminé les moteurs diesel de leur gamme de produits. Chez BMW, seule la Série 3 se vend toujours avec un moteur diesel. De plus, les trois constructeurs ont accéléré leurs plans d’électrification de leurs produits, en proposant désormais des hybrides rechargeables et des véhicules 100% électriques.
Sources :
New York Times
10 Monkeys and a Beetle: Inside VW’s Campaign for ‘Clean Diesel’
La Presse
Diesel : Volks, Daimler et BMW accusé de tests sur des singes et des humains
Agence France-Presse
Dutch have done human, animal diesel tests ‘for years’