Théâtre étudiant: Raconter leur histoire sur scène leur « a donné confiance »
Par Ève Ménard
Dans le cadre des Journées de la persévérance scolaire, Culture Laurentides a remis le prix Reconnaissance Art-Éducation à la Polyvalente Saint-Jérôme, pour son projet de création théâtrale porté par l’enseignante en francisation Marie-Ève Gervais.
L’année dernière, 13 jeunes des cours de francisation, ainsi que six élèves québécois issus du Programme d’éducation intermédiaire (PEI), ont créé le spectacle Histoires à venir…, qu’ils ont présenté au Théâtre Gilles-Vigneault.
« Je ne suis plus gênée »
Marie-Ève Gervais travaille avec le metteur en scène Tomas Sierra et l’Institut de recherche SHERPA depuis 2017. Au départ, l’idée était de proposer des ateliers de théâtre d’intervention aux élèves. Éventuellement, le projet de création est né. « Les jeunes voulaient faire une création. Ils voulaient partager leur histoire avec le public », indique l’enseignante en francisation. Après plusieurs mois de travail, le spectacle a été présenté le 9 juin 2022 au Théâtre Gilles-Vigneault.
Israa est une élève de la classe de Mme Marie-Ève. Elle a participé au processus créatif l’an dernier et tient cette année un rôle d’observatrice. Elle est arrivée de la Syrie il y a sept ans. La pièce nous en apprend davantage sur son histoire. « On parlait de choses qu’on avait de cachées dans notre cœur depuis des années. On a décidé de faire du théâtre pour montrer aux gens qu’on n’est pas différents », explique l’élève âgée de 13 ans. « Ça m’a fait du bien à mon cœur, c’était vraiment génial. Ça m’a donné de la confiance. Je suis courageuse et je ne suis plus gênée », dit-elle.
Cette année, le projet se poursuit. La troupe est composée d’élèves en francisation, d’anciens élèves de Marie-Ève et d’élèves du programme régulier ou du PEI. Sur une base volontaire, les jeunes se rassemblent les lundis et les jeudis entre 16h et 18h pour répéter. Le metteur en scène, Tomas Sierra, les accompagne.
Un projet positif
Ce projet permet la collaboration, l’échange et l’ouverture entre les murs de l’école. Pour une deuxième année, la cohorte de 5e secondaire du PEI participe au processus, comme groupe témoin. Le 15 février dernier, les élèves ont assisté à une première répétition. Ils ont offert leurs commentaires et posé des questions. « Ça permet aux élèves du secteur de la francisation de parler de leurs expériences. Et pour les élèves de Saint-Jérôme, c’est très percutant d’écouter des personnes partager leurs histoires », dit Simon-Pierre Bélanger, directeur adjoint responsable du PEI. « Le projet est extrêmement positif dans l’école », poursuit-il.
Isabelle Desbiens, directrice adjointe responsable de la francisation, était présente lors de la remise du prix Reconnaissance Art-Éducation. Elle qualifie ce moment de particulièrement émouvant. « Il y a beaucoup d’implication dans ce projet-là. Ce que je trouve extraordinaire, ce sont les liens qui se créent au niveau des jeunes et des enseignants. C’est comme s’ils faisaient partie d’une petite communauté. »
Un prix dédié aux jeunes
Pour Marie-Ève Gervais, le prix s’adresse surtout aux élèves. « Les jeunes pensent que leur histoire est banale, qu’elle n’est pas intéressante à partager. Lorsqu’ils reçoivent un prix comme celui-là, ils se sentent vus et écoutés. Ils sentent qu’ils font partie de la communauté et qu’on les reconnait. » Les bienfaits d’un tel projet pour les élèves en francisation sont « spectaculaires », témoigne l’enseignante.
C’est bénéfique pour leur estime de soi et pour leur apprentissage scolaire. « Comme ils parlent de leur histoire et de leurs traumas, ça libère de l’espace dans leur tête pour apprendre. La confiance en soi a aussi un impact énorme. Ça se répercute sur leur capacité à s’engager et à prendre leur place. » Cette année, le spectacle Histoires à venir… sera présenté le 7 juin au Théâtre Gilles-Vigneault.