Saint-Jérôme : « C’était de l’intimidation pure et simple » – Marc Bourcier
Par France Poirier
Ils étaient plus d’une soixantaine de citoyens venus se faire entendre pour les personnes en situation d’itinérance à Saint-Jérôme lors de l’assemblée régulière du conseil municipal le 20 février dernier.
En effet, le maire Marc Bourcier a dû ajourner l’assemblée à deux reprises alors que l’indiscipline régnait dans la salle. Des citoyens voulaient savoir ce que la Ville comptait faire pour l’itinérance et ils déploraient que des installations de fortune soient démantelées.
C’est le démantèlement d’un kiosque près de l’église Sainte- Paule offrant des vêtements aux personnes itinérantes qui a causé l’ire des personnes venues faire connaître leur mécontentement. Le maire a répondu que, compte tenu que ce dossier était devant les tribunaux, il ne pouvait pas commenter. Il n’en fallait pas plus pour que des personnes se mettent à crier contre le maire. « Shame, shame, shame [honte] », scandait le groupe lors du conseil avant que la séance soit ajournée.
L’un d’eux à qui nous avons parlé est natif de Saint-Jérôme. Il est un citoyen bénévole qui vient offrir de la nourriture aux personnes en situation d’itinérance. « Tous les dimanches on vient aider pour nourrir les personnes qui en ont besoin. On ne peut pas rien faire. »
Kiosque démantelé
Pour ce qui est du kiosque que la Ville a ordonné de démanteler, le maire Bourcier explique. « Nous sommes intervenus dans ce dossier après que des citoyens se soient plaints. On retrouvait des vêtements sur des terrains, un peu partout. Ce kiosque ne respectait pas les règles d’urbanisme et c’est pour cette raison que la personne a dû le fermer. À quelques pas de là, au sous-sol de l’église, il y a une grande quantité de vêtements disponibles ainsi qu’à la Hutte où les gens peuvent se ravitailler, prendre une douche et même trouver des vêtements », explique le maire de Saint-Jérôme. « Tout est mis en place pour aider les personnes. Je le répète, il y a un noyau dur de citoyens qui voulaient créer le chaos et ce n’est pas acceptable », souligne-t-il.
Pour le maire Bourcier : « c’était de l’intimidation pure et simple. Ce sont des gens qui ne sont même pas de Saint-Jérôme, qui ne connaissent pas la situation de Saint-Jérôme et qui veulent maintenir un certain chaos », nous a-t-il confié quelques jours après la soirée. En compagnie du maire de Saint-Colomban et préfet de la MRC de La Rivière-du-Nord, Xavier-Antoine Lalande, le maire a avoué réfléchir sur son avenir en politique en vue d’un second mandat. « C’est difficile pour les familles aussi. Les gens ont le droit de ne pas être d’accord et je comprends ça. Mais lorsqu’il n’y a pas de respect et de décorum comme ça doit l’être, c’est difficile de parler avec des gens qui ne veulent rien entendre », ajoute-t-il.
« Nous siégeons tous deux sur le comité de l’itinérance à l’Union des municipalités du Québec (UMQ). Et je peux vous dire qu’à part les grandes villes, Saint-Jérôme est l’une des villes qui en a fait le plus pour la situation de l’itinérance. Alors de venir se faire dire par des gens qui ne sont même pas de Saint-Jérôme qu’on ne fait rien, ce n’est pas vrai et nos citoyens le savent », a souligné M. Bourcier.
Rappelons que la Cour supérieure refusait, le 29 décembre dernier, d’émettre une injonction interlocutoire provisoire pour que la Ville de Saint- Jérôme cesse immédiatement de démanteler les campements de sans-abri. C’est l’organisme la Clinique juridique itinérante qui en avait fait la demande devant le tribunal.
Cet organisme juridique de défense des droits des personnes itinérantes plaide que Saint- Jérôme contrevient aux droits fondamentaux des sans-abri, puisque la municipalité n’offre pas de solution de rechange adéquate aux campeurs expulsés, rapportait La Presse.
Une situation pour des spécialistes
« Si tout le monde tente de régler une situation à sa manière alors que ça demande de l’entraide et des spécialistes, on arrive à un chaos. Il y a la Hutte à Saint-Jérôme qui travaille avec des partenaires comme le CISSS. L’itinérance est un problème régional et toutes les villes travaillent ensemble pour régler cette dynamique. C’est une situation de vie complexe : c’est une addition de plein de situations qui fait en sorte que les gens n’ont plus de moyens. Ça prend des professionnels pour s’occuper de ça. Moi, je ne suis pas d’accord de laisser les gens qui en ont le plus besoin entre les mains de gens qui ne sont pas formés pour s’occuper de ça. Ça prend des spécialistes. C’est correct de vouloir aider, mais de la bonne façon. Ça prend des gens qui savent ce qu’ils font », ajoute le préfet.
Le rôle des villes et municipalités n’est pas encore établi par le gouvernement. Elles s’impliquent, mais leur rôle n’est pas défini et chacun de son côté essaie de faire de son mieux avec les moyens mis à sa disposition, nous ont expliqué les deux maires.