Promouvoir plutôt que restreindre ?

Par Marie-Catherine Goudreau

Le gouvernement de François Legault a adopté le projet de loi 96, qui réforme la loi 101 sur la Charte de la langue française. Selon certains anglophones des Laurentides, le gouvernement devrait promouvoir la langue, plutôt que d’ajouter des restrictions qui ont des impacts sur les minorités.

Carolynn Roberts, résidente de Mille-Isles, a siégé comme représentante des Laurentides sur le Comité provincial d’accès aux services de santé et sociaux en anglais pendant 3 ans. Elle a aussi travaillé dans le système d’éducation du Québec pendant une vingtaine d’années.

« On dit que ça ne va pas toucher les secteurs de l’éducation et de la santé, mais c’est dans les petites affaires qu’il va y avoir des impacts. Par exemple, quand on appelle pour recevoir un soin de santé et qu’on n’est pas capable de parler à quelqu’un en anglais », déplore-t-elle en entrevue avec le Journal. Selon elle, c’est dans les nuances du projet de loi qu’on verra le plus d’impacts.

« Il est décourageant de voir une population entière ne pas préserver activement sa propre langue et sa propre culture. Ce sera plutôt sur le dos des populations anglophones, autochtones et immigrantes. […] Pour les Laurentides en particulier, avec son héritage très distinct et fier du bilinguisme, le projet de loi sert à alimenter une lutte politique qui n’est pas nécessaire », souligne Mme Roberts.

Sacha De Vries est résident de Saint-Sauveur et a grandi à Morin-Heights. Il ne se sent maintenant « plus le bienvenu et comme un citoyen de second rang », écrit-il par message. « J’ai l’impression que le gouvernement essaie d’affaiblir les anglophones, de les faire partir et de nous faire sentir comme si nous n’étions pas désirés. » Il pense même à déménager de la province avec sa femme, avec d’autres personnes qu’il connait, affirme-t-il.

Miser sur la valorisation de la langue

Selon la résidente de Mille-Isles, Carolynn Roberts, ajouter plus de restrictions et de règlements ne va pas aider à la protection de la langue française. « Je n’ai jamais pensé que de limiter les gens amènera un changement positif », dit-elle.

Daniel Smith habite à Morin-Heights depuis plus de 10 ans. Il est aussi concerné par l’accès aux soins de santé pour les anglophones. « Je comprends l’objectif du projet de loi pour protéger la langue, mais je crois qu’il faut se pencher plus sur la promotion plutôt que la protection », dit-il.

M. Smith estime que de restreindre l’accès à l’éducation en anglais peut désavantager les générations futures. « Qu’on le veuille ou non, le langage de « business », c’est l’anglais. Il faut trouver une balance », soutient-il.

M. De Vries croit quant à lui que de rendre l’accès à des cours de français plus facile pourrait aider à promouvoir la langue et la protéger.

« La plupart des sites web pour les cours de français sont en français. Ma femme voulait suivre des cours, mais elle n’a pas pu s’y retrouver à cause de cela », explique-t-il.

« L’animosité qui caractérise les questions linguistiques au Québec creuse un fossé entre les personnes qui parlent des langues différentes. L’oppression n’est pas la solution », soutient M. De Vries.

Changements dans la loi

La réforme de la loi 101, qui date de 1977, implique entre autres l’ajout de trois cours supplémentaires en français au Cégep. Les places dans les cégeps anglophones seront aussi limitées dès la rentrée 2023. Les immigrants installés au Québec depuis plus de six mois recevront les communications de l’État seulement en Français. Dans les milieux de travail, les entreprises ayant plus de 25 employés devront communiquer en Français aux employés qui le demandent. De plus, le ministre de la Justice pourra interdire à la Cour du Québec et aux cours municipales d’imposer la maîtrise du français et de l’anglais à leurs juges.

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