Moisson Laurentides : « La demande est en train de presque doubler chez les organismes »
Par Daniel Calvé
À travers la crise actuelle, l’aide alimentaire occupe une place centrale et critique. Alors que la demande augmente, les organismes arrivent-ils à répondre à celle-ci, avec un approvisionnement suffisant malgré les circonstances? Le message est plutôt encourageant, mais reste qu’ils auront besoin d’aide.
Moisson Laurentides, en tant que seule banque alimentaire des Laurentides, appro- visionne pas moins de 101 organismes sur son territoire. La directrice générale, Annie Bélanger, nous dépeint le portrait actuel de la situation. « En ce moment nous observons une baisse d’approvisionnement de 40% par rapport à la normale. En parallèle, la demande est en train de presque doubler pour les organismes », affirme-t-elle. « Il y a des gens qui n’étaient pas des usagers des comptoirs d’aide alimentaire qui vont cogner à leurs portes parce qu’ils ont perdu leur emploi, par exemple », ajoute-t-elle. « On dessert généralement 101 organismes, mais présentement, on en a peut-être 75 qui sont vraiment en aide alimentaire et qui sont ouverts et offrent des services. »
En mode solution
La première semaine de la crise a été la plus difficile au niveau de l’approvisionnement de certains aliments, comme les fruits et les légumes. « Immédiatement, on s’est mis à réfléchir à des façons de remédier à la situation. On a obtenu certaines sommes d’argent via notre réseau de Moisson et le réseau des Banques alimentaires du Québec. Il y a eu des dons notamment du gouvernement, de la SAQ, de Loto-Québec. On s’en sert pour acheter des aliments. »
Moisson Laurentides travaille donc activement à cette chaîne d’approvi-sionnement. « Cela a repris un peu son cours normal », souligne Annie Bélanger. « On relance toutes les entreprises agroalimentaires qui produisent des aliments pour leur rappeler qu’il y a des besoins en croissance et qu’on a besoin d’eux. »
Les efforts déployés
Il s’agit d’un travail très exigeant. « On met tous les efforts pour être capable de répondre aux besoins des organismes, mais c’est certain qu’on a besoin de continuer de recevoir des aliments. » Tout de même, une belle mobilisation se fait sentir. « Les gens font des dons sur notre site internet. On sent une solidarité. Je pense que c’est important, c’est ce qui nous donne la force de continuer. »
La banque alimentaire doit aussi s’adapter à cette situation particulière. La directrice générale m’explique que des question-naires sont envoyés aux organismes afin qu’ils spécifient leurs besoins et les quantités nécessaires. « On a aussi dû commander rapidement des boites et des sacs. Généralement, ce n’est pas quelque chose où on va dépenser parce qu’on les réutilise. Mais dans le contexte actuel, pour minimiser les risques de contagion, on n’en réutilise pas. »
Tel un marathon
Pour l’instant, la directrice générale de Moisson Laurentides m’affirme que pour eux, tout se passe bien au niveau du personnel et des bénévoles. « On se croise les doigts. On se fait des scénarios pour être capable de poursuivre nos activités si jamais la situation évoluait autrement, mais pour l’instant, ça va bien. »
Ce qui inquiète plutôt la directrice, est le fait que la crise ne se terminera pas de si tôt. « Moi je le vois un peu comme un marathon. […] C’est d’être capable de prévoir, de ne pas manquer d’aliments, de ne pas tout dépenser les sommes en même temps pour être capable de continuer de s’approvisionner au fil des semaines. » Annie Bélanger souligne que le réseau des Banques alimentaires leur a demandé d’estimer leurs besoins sur huit semaines. « J’imagine que c’est l’un des scénarios envisagés, mais ça peut changer », ajoute-t-elle.
L’après-crise
Même une fois la pandémie terminée, les besoins et la demande seront encore très importants compte tenu des répercus-sions économiques. « Au niveau des organismes communautaires, ça fait partie aussi de nos inquiétudes. Cette année, on reçoit des dons, mais l’année prochaine, les entreprises qui nous supportent généralement, si leur santé financière est moins présente, ils n’auront pas le choix de diminuer leur part. »
Annie Bélanger souligne qu’ils essaient tranquillement d’anticiper comment l’après-crise va se dérouler. « On espère que ça va bien aller. Je pense que pour la prochaine année, le rôle de Moisson Laurentides et des organismes qui travaillent en sécurité alimentaire va être encore plus important. »