Lowes-Rona : Rien ne va plus
Par Daniel Calvé
Le sujet a défrayé les manchettes économiques ces dernières semaines, et il fait toujours couler beaucoup d’encre.
Importantes délocalisations (lire, mises à pied) d’employés de Boucherville au profit du siège social de Lowe’s aux États-Unis, mise à la « retraite » du PDG Canadien de Lowe’s, l’équipe originale de la haute direction décimée, une entreprise en débandade qui franchement, après l’acquisition de Rona, n’a jamais vraiment réussi l’intégration de la bannière dans son giron. Plusieurs marchands de chez nous sont mécontents, et une multitude d’employés sont inquiets, car tous ressentent les effets néfastes d’une vision corporative en perdition.
Déconnecté du Québec… ou simplement des affaires ?
À ceux qui croient que les contreperformances commerciales de Lowe’s et de ses bannières sont seulement l’histoire d’un géant américain qui n’a pas compris le marché québécois, détrompez-vous, car rien n’est moins vrai – il s’agit ici d’une combinaison de plusieurs facteurs incluant une offre de service inadapté flanqué d’une exécution complexe et pas toujours efficace.
À preuve et à titre de comparable, l’Américaine de la rénovation Home Dépôt, fracasse des records de ventes et a vu ses profits augmenter année après année. Et que dire, toujours dans le secteur de la vente au détail, des performances olympiennes du géant américain Costco ?
Je ne vais même pas vous parler de Walmart ni de McDonalds, leaders mondiaux qui, nonobstant nos préférences et nos valeurs, frappent dans le mile sur le plan commercial, peu importe le pays dans lesquels ils s’implantent. L’adaptation est cruciale, certes, mais ultimement c’est une question de gestion et de recette d’affaires, et non de pays d’origine – un champion de sa discipline reste champion de sa discipline, qu’il opère ici ou ailleurs dans le monde.
Une structure opérationnelle éminemment complexe
Voilà une des principales raisons qui explique les déboires de Lowe’s au Canada, et spécialement au Québec. Trop de marques de commerce (Lowe’s, Rona, Réno-Dépôt, Ace, etc), trop de déclinaisons (Entrepôt, cour à bois, quincaillier, etc.) trop de superficies variées (Des mégacentres au petits magasins de quartier), trop de différences entre la réalité des franchisés qui veulent desservir leur localité et les établissements corporatifs qui appliquent une politique nationale, trop de produits mésadaptés, trop trop trop.
En clair, ça devient un enfer à opérer et comme j’aime le dire, la complexité sera toujours l’ennemi de l’exécution. Ce n’est donc pas le fruit du hasard si les Canac, BMR, Patrick Morin et cie gagnent du terrain : leur offre est simple et il donne le service, notamment aux entrepreneurs en construction, un important segment de marché, malmené dans la stratégie de Lowe’s.
Pourtant, ledit segment en est un majeur qui avait fait le succès et l’envieuse réputation des centres de matériaux Marcil, qui rappelons-nous, étaient LA référence dans le domaine avant son rachat, justement par Rona. Les employés et les commerçants opérateurs : les premiers dont on devrait se préoccuper.
Je respecte le premier ministre dans son « invitation à acheter québécois », déclaration qu’il a faite lorsqu’il a été invité à se prononcer sur la présente affaire impliquant les licenciements chez Lowe’s – mais il est important de nuancer.
Lorsque je vais acheter de la peinture chez Rona (l’ancien Marcil), des outils chez la famille Dagenais, que j’achète à Saint-Sauveur, à Saint-Jérôme ou ailleurs, j’encourage quand même un marchand d’ici qui au final fait travailler du monde d’ici – il ne faut pas tout mettre dans le même panier et penser aux employés qui ne sont que les victimes collatérales d’une transaction qui assurément, aurait dû être différemment gérée – nous suivrons pour vous le dossier.