La valeur inestimable du testament spirituel
Par Lpbw
NDLR. Nous poursuivons la publication des réflexions du réputé sociologue et théologien jérômien Jacques Grand’Maison. Réflexions que M.Grand’Maison a placées sous le thème "Des valeurs et repères dont on ne parle pas ou si peu dans l’état de nos mœurs actuelles".
Ceux-ci sont porteurs du sens communautaire de la mort humaine et de ses adieux.
Encore ici on mesure le degré d’humanité d’une société par le traitement de ses morts.
Plus qu’un legs matériel
Un testament est plus qu’un legs matériel ou d’argent. Ce qui est le plus précieux pour les générations qui nous suivent, ce sont nos valeurs et convictions les plus profondes, ou encore une foi qui a inspiré toute une expérience de vie. Si les volontés du défunt sont rattachées à ce fond humain spirituel, les délibérations des héritiers autour du testament en seront plus saines dans tous les sens du terme.
À tort ou à raison, il me semble qu’on a peu réfléchi sur les sens sociaux, culturels, moraux et spirituels du testament.
Toutes les expériences de la vie, même les plus banales, peuvent receler un ou des sens cachés quand on les ressaisies dans le partage de la mémoire et avec un regard plus intérieur.
Mon vieux père, avant sa mort, m’a dit simplement et modestement : « J’ai fait mon gros possible. » Il m’a renvoyé à toute sa vie, tout en ressuscitant paradoxalement des souvenirs oubliés. Ce fut sa dernière transmission, peut-être la plus significative pour continuer ma propre route avec ce court « spirituel », mais qui a tellement d’âme.
Il n’en reste pas moins que le testament écrit peut mieux se transmettre aux générations qui nous suivent. Depuis des décennies, j’incite les aînés à le faire. Mais d’entrée de jeu, plusieurs se demandent comment s’y prendre. Je leur dit que c’est d’abord en faisant le récit de leur vie que vous allez trouver les mots pour vous dire.
Mais je n’ignore pas que beaucoup de styles de vie d’aînés, et particulièrement de retraités s’enferment dans leur monde à eux. Et puis il y a un autre type de vie d’isolement qu’on idéalise un peu trop. Il s’agit de tout concentrer dans son domicile privé. Des recherches récentes ont souligné le fait qu’il y a de plus en plus d’aînés qui vieillissent seul et meurent seul.
Groupes d’entraide
Bien sûr, il y a d’autres styles de vie d’aînés fort bien intégrés dans la société, en contact avec les autres générations. Je pense à ce beau phénomène social de ces grands-mères rassembleuses qui sont restez souvent le seul pôle stable de l’inter-génération actuelle. Ce sont elles qui sont le plus en mesure de laisser un testament spirituel.
Mais tous les différents styles de vie pourraient se faire du bien et faire du bien en s’investissant dans la transmission de leur testament spirituel. Une démarche qui remplit de vie même leur mort et leurs adieux. Un enrichissement de tous ordres quoi!
Heureusement, des aînés organisent des groupes d’entraide pour s’initier à bâtir leur propre testament spirituel.
Je souligne deux bienfaits. Le premier est de redonner au testament spirituel son statut de valeur vécue et inestimable. Et le bienfait du caractère précieux d’un témoignage et d’un exercice de sagesse. Un bon vieux proverbe dit encore qu’on a besoin d’âge pour être sage, mais que le grand âge n’en donne pas forcément. Il faut le cultiver.
J’ai eu le privilège de lire des testaments de nos ancêtres chrétiens du 19e et du début du 20e siècle. Il y avait là une expérience, une intelligence, une spiritualité qui n’avait rien de la Grande Noirceur tant décrié aujourd’hui.
Dans mon dernier ouvrage, inspiré du meilleur de notre culture moderne, j’ai exploré neuf voix d’accès au spirituel au choix pour un testament spirituel. Le titre : « Pour une spiritualité au quotidien », Édition Novalis, 2013.
1 commentaire
Ma soeur Bertha a laissé un testament spirituel. C’est très touchent. Je l’ai envoyé à toute la famille.
R.L.