Photo : Archives de Nordy

La densification douce : Une solution à explorer ?

Par Marie-Catherine Goudreau

Comment aménager nos villes pour mieux densifier, offrir plus de logements, tout en conservant les milieux naturels qui caractérisent si bien notre région ? C’est un questionnement que plusieurs villes ont à l’heure actuelle, et sur lequel plusieurs villes au Québec décident d’agir. L’une des solutions passe par la densification douce dans les périmètres urbains.

Qu’est-ce que la densification douce ? Florence Clermont, urbaniste et chargée de projets pour la firme en urbanisme et en aménagement du territoire Arpent, explique qu’il s’agit de « l’ajout d’unité résidentiel dans des secteurs déjà construits. On parle d’une à deux unités par bâtiment principal. »

Depuis juin 2024, le gouvernement québécois « autorise de plein droit les logements accessoires et attachés, issus d’une subdivision ou d’un agrandissement d’un bâtiment principal totalement résidentiel, à l’intérieur des [périmètres urbains] […] », lit-on dans le projet de loi 31. Le gouvernement indique toutefois que les municipalités peuvent « exclure toute partie de leur territoire de cette autorisation ». « Cette mesure temporaire a été adoptée pour aider à la crise du logement », explique Mme Clermont.

Les contraintes

La Municipalité de Sainte-Anne-des-Lacs dans les Pays-d’en-Haut a tenu une consultation publique cette année dans le cadre de la révision de son plan d’urbanisme. Dans cette révision, le conseil municipal avait inclus les unités d’habitation accessoire (UHA) détachées. Cependant, après la consultation en personne, beaucoup de personnes se sont opposées à cette règlementation. Le conseil a donc décidé de retirer cet aspect de son plan d’urbanisme.

Selon Catherine Hamé, mairesse de Sainte-Anne-des-Lacs, les principaux freins pour la population à la densification douce par les unités d’habitation accessoires sont : la circulation et le traffic qui augmentent, les fosses septiques, le déboisement et les Airbnb. « Toutefois, il n’y a rien là-dedans que la règlementation ne peut pas encadrer », soutient Mme Hamé.

Une autre contrainte reliée à la densification est « qu’on demande aux propriétaires d’être entrepreneurs », soutient Florence Clermont. « Quand on parle de densification douce, ce sont les propriétaires qui décident d’entreprendre un projet au lieu d’un promoteur qui construit un bloc de huit logements. C’est très prenant. Surtout en ce moment, c’est difficile de faire des projets de construction », explique l’urbaniste.

« En ce moment, dans l’imaginaire collectif, on voit cela comme un échec d’accès à la propriété », rapporte Florence Clermont.

La mairesse a pour sa part observé que cette pratique était bien implantée sur le territoire, il y a de cela plusieurs années. « On pense que c’est un changement de culture en matière d’aménagement, mais ce ne l’est pas. Ça fait partie de notre patrimoine architectural dans la région. Si on se promène à Sainte-Adèle, Sainte-Anne-des-Lacs ou Saint-Sauveur, des terrains où il y a deux maisons, il y en a beaucoup », explique Mme Hamé.


Qu’est-ce que les unités d’habitation accessoire ?

« Unité d’habitation accessoire est un terme parapluie qui désigne une résidence secondaire aménagée sur un lot déjà occupé par une résidence principale. Une UHA peut notamment prendre la forme d’une maison de fond de cour, d’un pavillon de jardin, d’un garage réaménagé en logement ou d’une annexe au bâtiment principal », peut-on lire dans le document Les unités d’habitation accessoires – Guide sur les grands principes et bonnes pratiques, rédigé par l’Arpent.


Les défis de la densification

Du côté de Saint-Jérôme, la Ville permet déjà la construction d’UHA dans son périmètre urbain, selon certaines règlementations. Dans son nouveau plan d’urbanisme, qui sera présenté à l’automne, la Ville souhaite entre autres favoriser la densification de certaines zones de la ville, comme le centre-ville, le quartier de la Santé où l’on retrouve l’hôpital et le quartier industriel ouest, explique le maire, Marc Bourcier. On inclura aussi dans le plan des mesures pour favoriser la densification douce et les UHA.

« Avant, c’était le far west à Saint-Jérôme. Maintenant, on a établi des priorités, notamment d’arrêter l’étalement urbain et densifier certaines zones », explique le maire.

Au niveau du centre-ville, il y a plusieurs projets de tours à logements en cours, comme celui sur l’ancien site du Tigre Géant, et d’autres à venir. Puis, avec les nouveaux logements construits, la Ville exige qu’on y retrouve des services de proximité. Par exemple, au bas d’une tour de logements, il faut des commerces aussi afin de garder les personnes dans le centre-ville et éviter qu’elles se déplacent en voiture à l’extérieur.

Un des enjeux qu’a la Ville de Saint-Jérôme face à la densification et la création de logements, c’est le transport en commun. « On pousse beaucoup et on travaille avec exo pour développer le service de transport en commun », explique le maire. L’objectif est aussi qu’une personne puisse habiter et vivre dans le même secteur, sans prendre sa voiture.

Sensibiliser et informer

Il y a plusieurs avantages à construire ou à ajouter une unité d’habitation accessoire. Le plus grand reste celui des revenus supplémentaires. Ces UHA permettent aussi d’offrir un logement à proximité à un proche, une personne âgée ou en situation de vulnérabilité. Les municipalités peuvent aussi mettre en place des taxes pour inciter les citoyens à utiliser davantage l’espace sur sa propriété.

« Ce que je trouve dommage, c’est que les municipalités vont permettre les garages accessoires de trois étages à côté de la maison principale, mais quand il est question de faire un bâtiment accessoire pour donner un logement à des personnes qui en ont besoin, là, on n’est pas d’accord », déplore Mme Hamé. Selon la mairesse, il y a une réflexion collective à faire pour trouver des solutions à la crise du logement.

Le conseil municipal de Sainte-Anne-des-Lacs souhaite continuer à sensibiliser et mieux informer sa population sur ce genre de mesures. « On a ouvert le débat et on a entendu les préoccupations des gens. Maintenant, ça va être de partir de celles-ci et de continuer de travailler ce changement », explique Mme Hamé.

À Saint-Jérôme, le maire souligne que la population est en faveur de la densification du centre-ville. « On a un vrai centre-ville et il faut le faire vivre. Les gens voient Saint-Jérôme comme une ville avec les attraits de la campagne ou comme une vie de campagne avec les attraits de la ville. »


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