(Photo : Nordy - Sébastien Fleurant)
Ces publications sont vues par des dizaines de milliers d’utilisateurs.

L’humiliation totale sur TikTok

Par Charles Séguin

En collaboration avec France Poirier

En scrollant sur TikTok, vous pourriez tomber sur l’image de votre école secondaire sur laquelle est apposé un texte ressemblant à celui-ci : « J’expose une moune (fille) que son entrejambe est ouvert au public ». Balayez à gauche pour voir une capture d’écran du profil de la personne visée.

Si humiliation et insultes ont souvent été de pair avec l’école secondaire, sur TikTok, l’intimidation dépasse la mesure. Des comptes anonymes mènent des campagnes de salissage en « exposant » des élèves d’une école secondaire.

Depuis l’avènement des réseaux sociaux, de telles campagnes de cyberintimidation ont déjà eu lieu. L’algorithme de TikTok semble cependant exacerber le phénomène en lui donnant une visibilité encore jamais vue. Ces publications sont vues par des dizaines de milliers d’utilisateurs et cumulent des centaines de commentaires et de partages.

Toutes les publications utilisent la chanson Godo Godo du rappeur Fior 2 Bior. Les tendances sur TikTok naissent souvent du remixage d’un même son par les utilisateurs. Le rappeur a d’ailleurs dénoncé l’utilisation de sa chanson à des fins d’intimidation.

Cette tendance qui prend racine en France s’est implantée dans les écoles secondaires québécoises il y a plus d’un an. Le Journal a repéré des comptes « expose » actifs associés aux écoles polyvalentes Cap-Jeunesse, Saint-Stanislas, des Monts et Saint-Jérôme, entre autres. Avec le retour en classe, le phénomène continue de faire des victimes majoritairement féminines.

Comment gérer une telle situation

La police de Saint-Jérôme connait bien le phénomène. Bien que ces publications soient anonymes, il est important de signaler à la plateforme TikTok pour dénoncer le contenu indésirable. La personne peut aussi dénoncer la situation à un responsable de l’école, au policier en milieu scolaire ou au Service de police, nous a expliqué Mélissa Bossé, sergente au Service de police de Saint-Jérôme.

Si la situation le permet, une plainte civile pour atteinte à la réputation peut être faite ou une plainte criminelle pour intimidation, libelle diffamatoire et/ou harcèlement. « Même si la personne plaignante n’a pas assez d’éléments pour porter plainte ou si elle ne désire pas s’impliquer dans le processus de la plainte, les policiers peuvent la rencontrer pour lui expliquer les conséquences judiciaires auxquelles elle s’expose si la situation persiste. »

Comme l’explique la sergente Bossé, l’enjeu relié au phénomène J’expose est d’être en mesure d’identifier et de retracer la ou les personne(s) instigatrices. En fait, ce phénomène permet de publier de façon anonyme.

Lutte contre l’intimidation

« Les écoles sont très au fait de cette situation et nous n’avons pas de politique mur à mur. Par ailleurs, nous avons un plan de lutte contre l’intimidation et la violence. Les mesures et les interventions sont propres à chaque école et sont portées par l’équipe de l’école et le conseil d’établissement », explique la porte-parole du Centre de services scolaire de la Rivière-du-Nord, Nadyne Brochu.

Elle ajoute qu’il y a des policiers éducateurs dans les écoles. Il y a également des ateliers de prévention. « Le problème avec J’expose, notamment, c’est que c’est fait de façon anonyme. Les intervenants dans les classes font de la vigie. Quand ils peuvent intercepter, ils le font. Ils sensibilisent les élèves aux comportements à adopter sur les réseaux sociaux et parlent des conséquences de l’intimidation », ajoute-t-elle.

Par ailleurs, c’est souvent fait en dehors de l’école. Selon elle, il y a une part de responsabilité qui revient aux adultes qui gravitent autour des jeunes, lorsqu’ils ne sont pas à l’école.

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