«Il y a trop de voitures sur les routes»
Chamreun Prum a déménagé à Saint-Jérôme le 1er mars 2020, alors que la pandémie commençait. Après avoir travaillé de la maison durant trois mois, elle a dû retourner à son lieu de travail du lundi au vendredi à Montréal. « En juin 2021, j’ai décidé de changer d’emploi pour conserver ma santé mentale », raconte-t-elle.
Avec sa famille, Mme Prum cherchait à se construire une maison dans un quartier plus sécuritaire et familial, et à un prix abordable. C’est pourquoi elle a choisi Saint-Jérôme. Le matin, il lui fallait 45 minutes pour se rendre à son emploi. Le soir par contre, ça pouvait lui prendre de 1h30 à 2h. C’était assez pour la pousser à quitter son emploi.
Christian Gagnon, résident de Saint-Jérôme depuis 2018, choisit les journées où il se rend au travail à Laval. La pandémie lui a permis de faire du télétravail les autres journées.
« Quand je dois aller au bureau, je choisis mes journées en fonction du trafic. Je n’irais pas un vendredi, par exemple, parce que le retour est trop pénible », souligne-t-il.
Depuis le début de l’automne, le trafic sur nos routes semble pire qu’avant la pandémie. Il y en a plus tôt, plus souvent et même les week-ends. Sur Facebook, les commentaires des résidents des Laurentides sont nombreux sur le sujet.
« Il n’y a pas juste la 15… La 158 vers Sainte- Sophie et même vers Saint-Canut est de pire en pire ! »
« Je dois passer par mes petites routes alternatives pour éviter à nouveau le trafic intense entre la 640 et la 440. Sinon ça prendrait 1h30-1h45… »
Les villes construites autour de l’automobile
« Ce n’est pas une surprise. Ça fait longtemps qu’on observe une augmentation du parc de véhicules et il y a plus d’automobiles vendues », affirme Catherine Morency, titulaire de la Chaire de recherche du Canada sur la mobilité des personnes.
Le nombre d’automobiles augmente plus vite que la population en âge de conduire, explique-t-elle. « Le problème n’est pas nécessairement à Montréal ou dans les proches banlieues, ce sont dans les couronnes. » Là, l’automobile occupe une place importante.
On traite ceux qui se déplacent autrement qu’en voiture comme des citoyens de deuxième ordre. Ils ont moins de valeur économique.
« On a planifié ces secteurs seulement pour les autos », souligne Mme Morency. Le taux d’occupation des véhicules est aussi « catastrophique », selon Mme Morency. Selon des études réalisées par la Chaire en 2018, un véhicule transportait 1,12 passager lors de l’heure de pointe du matin. « Ce n’est pas les personnes qui créent la congestion, c’est le vide ! »
Parmi les lieux de congestion importants, il y a les écoles. « Aujourd’hui, il y a une systématisation du transport de l’enfant vers l’école. Ça amène des véhicules sur la route et près des écoles. C’est un gros enjeu », explique Mme Morency.
Alternatives
Selon elle, on ne devrait pas mettre les gens dans des boites comme « cyclistes » ou « automobilistes ». « Quand on regarde le futur de la mobilité, il faut travailler à rendre les gens multimodaux. Il faut que chaque individu puisse imaginer qu’il y a plusieurs façons de se déplacer pour différents trajets. »
Au moins une partie des déplacements pourraient se faire en vélo ou à pied, croit Mme Morency. « Mais il faut que ce qu’on leur offre convienne à leurs attentes, qui sont très diversifiées. » Pourtant, il y a plusieurs gains à obtenir en se déplaçant autrement qu’en voiture, explique-t-elle, ne serait-ce que pour la santé.
La solution n’est pas de construire de nouvelles routes, explique Mme Morency. « En automobile, on ne peut pas augmenter indéfiniment l’offre, car dès qu’on augmente l’offre, la demande augmente. » Il faudrait faire l’inverse, croit-elle.
Le premier pas à faire, soutient Mme Morency, est de ne pas faciliter les déplacements en automobile, puis de miser sur le transport en commun. « Pour implanter un réseau de transport en commun efficace, il faut d’abord qu’on le finance et que ce soit compétitif, en temps, en confort et en coût. » Il faut aussi que, une fois rendu à la destination, il soit possible pour la personne de se déplacer dans la ville.
1 commentaire
L’étalement urbain est créé par l’autorisation des villes à permettre aux promoteurs immobiliers de construire sans limite et qui se foutent bien de la capacité du réseau routier. On veut faire de l’argent avec les taxes et la vente de maisons au détriment de la qualité de vie. Donc, vu qu’il n’y a aucune concertation entre les villes et le provincial, on se retrouve avec un développement résidentiel disproportionné versus la capacité des réseaux routiers. La qualité de vie , initialement recherchée par ces gens qui déménagent en « campagne » est diminuée d’année en année car ces milieux sont vite envahis par cette nouvelle clientèle. Donc, que cela soit à St-Jérôme, St-Sauveur, Prévost ou Ste-Adèle le trafic s’installe et devient une nouvelle réalité qui tranquillement , devient la normalité.