Habitation : Duranceau veut simplifier les règles
Par Simon Cordeau
La crise du logement se fait sentir partout au Québec. Les Laurentides en particulier ont vu leur croissance démographique accélérée par la pandémie. Maintenant, même des travailleurs à temps plein et des familles de la classe moyenne font appel aux banques alimentaires pour boucler leurs fins de mois. À Saint-Jérôme, l’itinérance prend de l’ampleur. « Quand je rencontre les élus, il y a toujours un point sur l’habitation », indique France-Élaine Duranceau, élue députée de Bertrand en octobre dernier. François Legault l’a nommée ministre responsable de l’Habitation, un poste qu’il a séparé des Affaires municipales. Entrevue.
Mme Duranceau et son cabinet travaillent d’abord à accélérer les projets en cours, en agissant comme « courroie de transmission » auprès des divers intervenants. « Les gens se demandent ce qui arrive, pourquoi ça prend du temps. Est-ce qu’il manque des documents? Est-ce que la ville ne veut pas? On est vraiment là pour permettre aux projets de lever de terre. »
Coordonner les efforts
La ministre admet cependant que : « Le système étant ce qu’il est pour le moment, c’est très laborieux. Il y a beaucoup d’intervenants. On a nos intervenants communautaires, qui portent leur projet à bout de bras. On a les municipalités, qui aident à trouver les terrains ou qui facilitent les transactions. Il y a du financement de la Société d’habitation du Québec, et il y en a du fédéral. Il faut faire en sorte que tout ça fonctionne. »
Pour que ces projets se réalisent, il est nécessaire que tous les intervenants soient mobilisés. « Ça prend un engagement de tout le monde. Et ça, je le vois de plus en plus », précise Mme Duranceau. Elle souligne que les municipalités comprennent bien l’importance d’avoir de nouveaux logements, pour tous. « Oui, c’est pour des gens qui sont vulnérables. Mais parfois, c’est pour des travailleurs qu’on veut accueillir pour des entreprises locales. D’autres fois, c’est pour des étudiants qui viennent au cégep. Tout le monde a un enjeu de logement en ce moment. »
Connaître l’écosystème
« Le processus est compliqué », admet volontiers la ministre. « Je veux simplifier les choses et les rendre plus fluides. » Avec la crise, il faut augmenter l’offre, et rapidement. « Il faut construire : du logement social, du logement abordable et du logement tout court, de manière générale. »
Mme Duranceau croit d’ailleurs que son expérience lui permettra de naviguer le milieu de l’immobilier et sa complexité. Lors de sa nomination, quelques médias ont critiqué le choix d’une « courtière immobilière », mais la ministre trouve cette description plutôt réductrice. « J’ai une formation de CPA [comptable professionnel agréé]. J’ai une maîtrise en fiscalité et j’ai été en charge d’un département de fiscalité. Et j’ai travaillé dans le domaine de l’immobilier commercial, sur des projets de développement et en courtage. »
Elle voit là des atouts importants pour accomplir son rôle de ministre responsable de l’Habitation. « Je connais l’écosystème. Je comprends la mécanique financière. Il faut comprendre les chiffres derrière. Sinon, ça devient irréaliste et les gens n’embarquent pas », illustre-t-elle.
Simplifier le processus
Ainsi, Mme Duranceau veut simplifier les subventions et les programmes gouvernementaux pour le logement social. Avec une approche plus souple, il sera possible de répondre plus efficacement aux besoins.
La ministre donne l’exemple du Programme d’habitation abordable Québec. « On est en train de le revoir. Je pense que c’était une bonne première itération. Par contre, autant les gens du secteur privé que du milieu communautaire nous ont dit qu’il y a des choses à ajouter. Par exemple, le programme ne prévoyait pas un fonds de démarrage. » Elle souhaite aussi imposer une limite de temps pour livrer un projet. « Je pense que ça ne sert personne qu’un projet soit sur la table pendant 8 ans, que les sommes d’argent soient réservées, mais qu’il n’y a rien qui se fait », illustre-t-elle.
Mme Duranceau entend aussi réviser le Programme supplément au loyer (PSL), afin de le rendre plus souple et de permettre à des personnes itinérantes d’en profiter, entre autres. Pour les développeurs et les entrepreneurs en construction, elle veut « créer un contexte qui est favorable » et pallier le contexte économique difficile et les taux d’intérêt élevés. « Il va y avoir des mesures financières. On explore ce qui est faisable pour être agile et encourager la construction. »
Sa collègue Andrée Laforest, ministre des Affaires municipales, travaille également à simplifier et faciliter la densification douce dans les municipalités, indique Mme Duranceau.