Les municipalités ne pourront plus ouvrir de nouvelles rues et devront se densifier. Archives : Nordy - Sébastien Fleurant

Fin du développement à l’extérieur des noyaux villageois

Par Simon Cordeau

Les nouvelles orientations gouvernementales en aménagement du territoire (OGAT) ont été dévoilées jeudi 30 mai par la ministre des Affaires municipales, Andrée Laforest. « Les municipalités ne pourront plus développer de quartiers résidentiels ou d’infrastructures à l’extérieur de leur périmètre urbain sans justification valable », rapportait Radio-Canada. L’objectif est de prioriser le redéveloppement et la densification des noyaux villageois et des infrastructures existantes.

« C’était attendu par les municipalités depuis longtemps. Il y a eu des consultations publiques », indique le préfet de la MRC de La Rivière-du-Nord et maire de Saint-Colomban, Xavier-Antoine Lalande, en entrevue avec le journal Le Nord. « Ça ne change pas grand-chose pour nous. C’est pratiquement de répéter l’orientation 10 adoptée par la CMM [Communauté métropolitaine de Montréal]. » « Ça ne m’étonne pas », concourt le préfet de la MRC des Pays-d’en-Haut, André Genest.

Le financement va-t-il suivre ?

Les deux préfets s’entendent : les objectifs sont « assez nobles ». « Nous, on est prêt à jouer le jeu », indique M. Lalande. Cependant, il est « primordial » que le financement gouvernemental suive. « Il faut que le gouvernement prenne conscience du poids que les nouvelles orientations vont avoir sur les finances publiques », insiste-t-il.

Avant par exemple, les promoteurs devaient payer eux-mêmes pour les champs d’épuration et les puits artésiens de leurs nouvelles constructions à Saint-Colomban. Mais maintenant, c’est la Municipalité qui devra offrir les services d’aqueduc et d’égout. Construire ces réseaux représentera « un coût très important », puisqu’il faut « forcément travailler dans le granite » à Saint-Colomban. « On vient rendre publiques des dépenses qui avant étaient privées. C’est quand même majeur comme investissement », s’inquiète M. Lalande. M. Genest affirme que l’enjeu est semblable dans les Pays-d’en-Haut, où la topographie est montagneuse et rocheuse.

M. Lalande estime le coût d’un réseau d’égout et d’une usine de traitement des eaux « entre 60 et 100 M$ ». « Clairement, la Ville et les citoyens ne peuvent pas assurer ça. Ça va prendre un engagement du gouvernement pour financer au moins 80 %. »

D’ailleurs, 43,7 M$ sont prévus pour appuyer le milieu municipal, dont 21 M$ directement aux MRC « pour les aider à intégrer les nouvelles OGAT aux documents de planification », peut-on lire dans le communiqué. La MRC des Pays-d’en-Haut, par exemple, est déjà en train de réviser son schéma d’aménagement.

Mais une fois que cela sera fait, y aura-t-il des sommes pour réaliser, sur le terrain, les objectifs établis dans les OGAT ? « Si on a l’objectif, par exemple, d’améliorer l’offre en habitation, c’est bien beau. Mais comment, après ça, on va le réaliser financièrement ? », illustre M. Genest.

De plus, les OGAT seront accompagnées d’indicateurs et de cibles, pour « mesurer l’efficacité de la planification partout au Québec », indique le communiqué de l’annonce. M. Genest se demande : y aura-t-il des pénalités si les cibles ne sont pas atteintes ?

Densification

Pour M. Lalande, l’objectif de freiner l’étalement urbain vient changer le « développement classique » des maisons unifamiliales dans Rivière-du-Nord. « Pour Saint-Colomban, Sainte-Sophie et Saint-Hippolyte, ça passe par la création d’un milieu de vie central, où on peut densifier et répondre à plusieurs impératifs : des commerces de proximité, une diversité de logements, une résidence pour personnes âgées, etc. »

Dans la MRC des Pays-d’en-Haut, certaines municipalités n’ont même pas de périmètre urbain, comme Sainte-Anne-des-Lacs et Wentworth-Nord, note M. Genest. Certains résidents ont aussi choisi la région pour ses grands espaces et sa faible densité, rappelle le préfet. Il reconnaît cependant l’intérêt de densifier les noyaux villageois et de ne plus construire de nouvelles rues. « Pour les municipalités, ultimement, c’est bon. Tu vas arrêter d’étendre ton développement. Un coup que la rue est bâtie, que tu déneiges pour 2 ou 20 maisons, c’est le même coût », illustre-t-il.

Cependant, certains propriétaires de terrain pourraient être mécontents, avertit M. Genest, puisqu’ils ne pourront plus le développer. « Vont-ils poursuivre les municipalités ? Est-ce qu’elles vont avoir une immunité ? », se questionne le préfet.

« Ce sont les Laurentides, avec Lanaudière, qui vont subir la plus forte pression démographique. Donc il faut aménager le territoire pour bien accueillir et éviter une crise », illustre M. Lalande.

Changements climatiques

Les OGAT « auront des effets concrets positifs pour la population sur plusieurs aspects, comme la qualité des milieux de vie, le transport, la mobilité durable, l’adaptation aux changements climatiques, la gestion des ressources en eau ainsi que la protection des milieux naturels et agricoles », peut-on lire dans le communiqué de l’annonce.

Les MRC devront également s’assurer de protéger 30 % de leur territoire en milieux naturels et, au besoin, reboiser. Si le couvert forestier sur le territoire est de plus de 50 %, elles devront en conserver au moins 50 %, rapportait encore Radio-Canada. Par ailleurs, les nouvelles OGAT remplacent celles qui étaient en vigueur depuis 30 ans.

Laisser un commentaire

Votre adresse courriel ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *