Protéger et partager la nature
Par Simon Cordeau
Pendant 50 ans, Pierre Gougoux a enseigné le plein air au secondaire et au cégep, à plus de 20 000 étudiants. Même à la retraite, il continue d’enseigner, et il entretient le réseau de sentiers de Sainte-Agathe-des-Monts avec d’autres bénévoles. « On ne peut pas sortir le prof
du plein air », lance-t-il en riant.
Deux à trois fois par semaine, M. Gougoux part en randonnée avec un groupe pour les initier au plein air, à la nature et à l’hiver. Souvent, des amis et d’anciens étudiants se joignent même à l’expédition. « Je continue encore, avec des immigrants ou des gens en francisation. Ce sont des adultes de la région. C’est toujours selon le principe que, si les immigrants aiment et découvrent l’hiver, ils vont aimer le Québec. C’est un défi pour eux. Souvent ils viennent de pays chauds et il faut bien les habiller. »
Le lendemain, samedi, il dirige une randonnée organisée avec Le Coffret de Saint-Jérôme, qui accueille et aide les immigrants à s’installer dans les Laurentides. Plus tôt cette semaine, il en a fait une avec une trentaine d’étudiants de l’école Marchand.
Souvent, il fait des sorties avec des étudiants du secondaire venus de Montréal. « Ils vien-nent de quartiers moins favorisés, dans l’est de la ville, et 75 % sont issus de l’immigration. Là-dedans, certains ne sont jamais sortis de Montréal. »
Pour M. Gougoux, les activités de plein air comme la randonnée en forêt ont d’abord une valeur pédagogique pour ces jeunes.
« Je crois que monter le sommet de la montagne, c’est très positif pour aider quelqu’un à prendre confiance en lui. Tu vois que tu peux réussir, que tu es plus fort que tu ne le pensais », illustre l’enseignant.
Conserver
Pierre Gougoux est aussi membre fondateur du club Plein Air Sainte-Agathe-des-Monts. Lorsqu’on évoque son bénévolat, il précise tout de suite qu’il n’est pas le seul à s’impliquer dans le plein air de la région.
« Je suis président du club depuis 28 ans, mais je suis avec neuf membres du CA, et heureusement qu’ils sont là! Tout le monde est bénévole là-dedans. On a un réseau de 35 km de pistes qu’on essaie de conserver et qu’on doit parfois déplacer. Actuellement, le nouveau conseil municipal et le nouveau maire sont intéressés à garder le réseau. Il y a une volonté politique. Ils se sont aperçus qu’avec la COVID, il y avait beaucoup
plus de gens intéressés par le plein air. […] C’est un moment historique pour les Laurentides », se réjouit M. Gougoux.
La plupart des sentiers sont voués au ski nordique. « C’est relativement accidenté. On a aussi beaucoup développé de sentiers de raquettes, pour éviter qu’ils aillent dans les sentiers de ski. Maintenant il y a autant, sinon plus, de raquetteurs que de skieurs. »
« L’épine dorsale, c’est le sentier Gillespie. La famille s’en servait pour aller à l’école, et après ça, pour aller aux compétitions de ski, en ski. C’est un sentier patrimonial centenaire », souligne le randonneur vétéran.
M. Gougoux a même 8 km de pistes chez lui, qu’il souhaite préserver à perpétuité pour ses descendants. « Je veux que le haut de mon terrain, la partie abrupte, soit réservée, et qu’il n’y ait jamais de développement. C’est le même principe que dans les Alpes, où ils ne construisent pas au sommet de la montagne, mais seulement en bas. Je veux que ça serve aux résidents. […] Les gens peuvent venir chez moi, se stationner et se promener, en autant qu’ils suivent les règlements, comme de rester sur les pistes et de ne pas apporter leur chien. Ça fait partie de mes valeurs de partage, de protection et de découverte de la nature et de l’environnement. » Pour Pierre Gougoux, le plein air est d’abord une affaire de communauté.