Choix
Par Rédaction
– Dossier Choix –
Cette semaine, nous nous sommes penchés sur le sens du mot « choix » et de ses déclinaisons. Le choix peut être un engagement contraignant ou une libération. Il peut être l’aboutissement d’une longue réflexion, ou le résultat d’une décision spontanée. Il peut créer un faux dilemme
ou, au contraire, être une illusion. A-t-on toujours le choix?
Par Simon Cordeau
Pour moi, choisir est toujours difficile. C’est traverser une porte, mais aussi refermer celle qui se trouve juste à côté. C’est s’engager dans un chemin, en laissant les autres derrière soi. Choisir, c’est rejeter les autres options.
Et j’aime considérer toutes les options, soupeser les pour et les contre, et explorer tout le champ des possibles. Après tout, c’est ce qui donne au monde et à la vie toute leur saveur : la diversité des expériences, des gens qu’on rencontre, des idées à considérer. Je voudrais goûter à tous les mets, lire tous les livres, aller partout…
Choisir? Malheureusement, on n’a pas assez d’une vie pour avoir tout, vivre tout, être tout. Choisir, donc, c’est s’engager. C’est passer à l’action et entrer dans le réel. Et ça peut être terrifiant. Pas seulement parce qu’on peut se tromper, mais parce que tout choix est un compromis. Est-ce que les bons côtés vaudront les mauvais?
Je ne crois pas qu’on devrait voir la vie comme une suite d’échecs et de succès, et tenter de faire pencher la balance avec notre prochaine décision. Il faut plutôt la voir comme une suite d’expériences, qui colorent notre vision du monde et qui façonnent qui nous sommes. On peut se réconcilier avec nos choix passés, tout en se laissant l’option de changer de chemin. Et on peut affirmer nos choix futurs, sans savoir exactement où ils nous mèneront.
Un ancien patron, Greg, m’a déjà dit : « La vie est une enseignante sévère. Elle te fait passer le test avant de te donner la leçon. » C’est pourquoi j’essaie, toujours, de choisir avec enthousiasme mais humilité.
Par Ève Ménard (initiative de journalisme local)
Retour en 2008. J’ai 8 ans. On est au restaurant ma mère, mon père, ma sœur et moi. Les plats se déposent devant nos yeux. On commence à manger. Mes parents nous proposent de goûter à ce qu’ils ont choisi. Malheur, je préfère le repas de ma maman. Maintenant, je regrette mon choix. J’aurais dû prendre ce qu’elle a choisi. Heureusement, dans toute sa bonté, ma mère m’en offre – au grand désarroi de mon père – et prend une partie de mon plat.
Nos choix, j’ai l’impression qu’on a souvent tendance à les regretter quand on les compare aux autres. Et malheureusement, dans la vie, leurs retombées, qu’elles soient positives ou négatives, ça ne se partage pas aussi bien. Il n’y a pas toujours de mère bien attentionnée pour atténuer les regrets. Je crois qu’il faut avant tout faire des choix pour soi et surtout, les assumer. Choisir, c’est l’indépendance.
Est-ce que ça signifie qu’on ne doit jamais considérer les autres dans ce qu’on choisit? Pas non plus. Ça m’amène aussi à réfléchir aux limites du choix. On l’associe souvent à la liberté; je suis libre, alors j’ai le droit de choisir. Mais la limite de nos choix, je crois qu’elle se dessine lorsque ces choix briment la liberté de choisir d’autrui.
Des choix, ça se choisit, mais ça ne s’impose pas. C’est difficile de ne pas faire le lien avec le droit à l’avortement. Si A ne considère pas l’avortement comme un choix valide pour elle, alors dans l’éventualité où elle tombe enceinte, elle n’aura qu’à choisir d’avoir l’enfant. Si B ne souhaite pas avoir d’enfant et considère l’avortement comme une option, alors elle n’aura qu’à choisir de se faire avorter. Mais aucune n’a le pouvoir de choisir pour l’autre ou de lui imposer sa philosophie.
Encore aujourd’hui, au restaurant, j’ai de la difficulté à choisir. J’ai parfois tendance à prendre ce que je connais déjà, pour m’assurer de ne pas être déçue. Dans les choix réside aussi le risque. Le risque de regretter, bien sûr, mais aussi le risque de tomber sur quelque chose de merveilleux. La prochaine fois que j’irai au restaurant, je choisirai un plat auquel je n’ai jamais goûté.