Des investissements insuffisants en matière de violence conjugale
Par Ève Ménard
Eric Girard, ministre des Finances, a déposé le 25 mars dernier le budget du Québec 2021-2022. L’opposition n’a pas été tendre envers les investissements, les qualifiant notamment de conservateurs et caractérisés par un manque de vision et d’ambition.
Les derniers mois ont particulièrement secoué le Québec en matière de violence conjugale, avec 7 féminicides en seulement 7 semaines. À la lumière de cette série sombre, les ressources s’attendaient à des investissements importants. Le 10 mars dernier, on rapportait que le réseau était « à bout de souffle ». Fannie Roy, coordonnatrice à la Maison d’Ariane, nous indiquait un besoin de soutien « accru » et « croissant », et disait attendre le budget avec impatience.
Déception et inquiétudes
Celui-ci déploie finalement 22,5 M$ sur cinq ans pour rehausser les services offerts aux femmes victimes de violence conjugale, ce qui représente 4,5 M$ par année, en plus d’investir 10,4 M$ sur cinq ans en matière de condition féminine. Le Regroupement des maisons pour femmes victimes de violence conjugale s’est dit « outré » par la teneur du budget. « 4,5 millions supplémentaires par an, ça représente à peine 10% des besoins que le Regroupement réclame pour consolider et développer le réseau des maisons d’aide et d’hébergement en violence conjugale », a souligné Chantal Arseneault, présidente du Regroupement.
Fannie Roy partage la même déception et accueille le budget avec « inquiétude ». Une fois de plus, cet argent s’inscrit dans une perspective de consolidation uniquement, et non de développement et de bonification des services. La coordonnatrice de la Maison d’Ariane rappelle que la prévention et la sensibilisation sont des volets importants de l’enjeu, sans quoi on ne fait que « repousser devant nous le moment où nous pourrons éradiquer la violence faite aux femmes. » Or, le manque d’investissements force les organismes à concentrer leurs ressources pour les femmes qui vivent déjà de la violence conjugale
L’argent se fera-t-il attendre?
La semaine dernière, on apprenait via un article du Devoir que seulement 2 régions sur 17 avaient reçu le financement alloué dans le cadre du plan d’action pour prévenir la violence conjugale, dont les sommes avaient été annoncées dans le budget de mars 2020. Dans le cas de la Maison d’Ariane, Fannie Roy indique avoir reçu les investissements il y a environ deux semaines. Cet argent ne permettra qu’à consolider des services de base, déjà très précaires. « Nous ne sommes pas en mesure d’ajouter des services, lesquels sont criants d’être développés. »
Normalement, la coordonnatrice devrait recevoir l’argent annoncé le 25 mars en différents versements au cours de l’année. Elle espère que ce sera le cas, contrairement à l’année dernière. Elle avait alors dû absorber les dépenses, en attente du montant.
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Le budget en quelques chiffres marquants
10,3 milliards de dollars sur cinq ans, dont 2,9 milliards en 2021, pour renforcer le système de santé.
1,5 milliard de dollars sur cinq ans pour favoriser la persévérance scolaire et la réussite des jeunes
4 milliards de dollars sur cinq ans pour accélérer la transition vers la nouvelle économie du Québec
392 M$ seront injectés sur six ans afin d’aider à la relance de la culture et pour aider le milieu à se sortir des conséquences de la pandémie.
150 M$ sur cinq ans pour lutter contre l’exploitation sexuelle des mineurs
22,5 M$ seront investis sur cinq ans afin de rehausser les services offerts aux femmes victimes de violence conjugale.