(Photo : Luc Robert)

Déneigement : Des contracteurs rationnalisent leurs opérations

Par Luc Robert

Des compagnies de déneigement des Laurentides soutiennent ne pas avoir le choix d’abandonner des parcours moins rentables, pour survivre dans ce milieu compétitif.

Dans le secteur de Prévost, Équipe ESC Déneigement a tout d’abord averti une partie de sa clientèle le jeudi 13 juillet qu’elle révisait ses contrats, en voulant (sic) « prioriser ses clients de longue date ».

« […] Une compagnie de déneigement a décidé de mettre fin à ses opérations. De notre côté, ça engendre beaucoup de demandes de soumissions, ainsi que de la planification pour la prochaine saison. […] Nous voulons prioriser nos clients(es) fidèles, avant de donner des places aux nouveaux […]. C’est pourquoi je vais vous transmettre votre renouvellement plus tôt que les années précédentes. […] Une augmentation de 10 % a été programmée (en plus de celle de l’hiver précédant [NDLR]) pour l’ensemble de nos contrats. Nous suivons ainsi la courbe d’augmentation discutée à la réunion de l’Association des déneigeurs résidentiels et commerciaux du Québec (ADRCQ). Nous tentons d’apporter le moins d’augmentation possible, mais tout comme vous, nous subissons des hausses de tarifs de tous bords, tous côtés », a expliqué dans une missive électronique M. Serge Crépeau.

Délaisser certaines maisons

Or, sa compagnie a plutôt changé son capot de bord quelques jours plus tard, le mercredi 19 juillet, en laissant de côté des clients fidèles de plusieurs hivers.

« Chers clients, ce courriel est inévitable […]. Nous avons fait analyser la rentabilité de nos routes, ainsi que l’efficacité du service apporté. Certaines routes se sont avérées problématiques. Plusieurs facteurs en sont la cause. Entre autres, trop de kilométrage à parcourir, versus le nombre d’entrées à déneiger. Si vous recevez ce courriel, c’est que votre maison est très éloignée de nos opérations et que l’on ne dessert aucune autre ou très peu d’entrées sur votre rue. Nous sommes donc dans l’obligation […] de cesser notre offre de service. »

Relancé par l’auteur de ces lignes le lundi 24 juillet, à savoir qu’un employé du secteur du Domaine Laurentien gardait par le passé un tracteur-souffleur à son domicile pour desservir le coin, M. Crépeau a évoqué la raison suivante, sans élaborer sur la volte-face.

« L’ex-employé ne travaille plus pour nous et nos tracteurs sont entreposés sur la rue Principale à Prévost. Nous avons trop peu de contrats sur la rue des Trembles et des Ormes (secteur Lac-Saint-François), pour le temps que ça nous prend à faire le détour », a-t-il laconiquement répondu.

Nouvelle réalité

En cette période automnale, plusieurs clients se retrouvent orphelins d’un déneigeur, surtout dans le secteur du Domaine des Patriarches.

« C’est la nouvelle réalité des déneigeurs. Quand ils couvrent un grand territoire, ce n’est plus optimal pour le service. Les routes doivent souvent être regroupées à proximité pour sabrer (dans) les dépenses. Des entrées déneigées à 350 $, ce n’est plus rentable. Quand tu considères le prix des pièces de rechanges, qu’un tracteur neuf équipé est passé de 80 000 $ à 130 000 $ en quelques années, tu n’as souvent pas le choix de revoir tes opérations. Aux Patriarches, l’escarpement de plusieurs entrées est en cause », a constaté un autre déneigeur, qui a préféré conservé l’anonymat.

Le même contracteur assure qu’il n’y a pas de collusion entre les déneigeurs.

« Au contraire, il y en a même qui arrivent dans nos endroits habituels en coupant les prix, sans avoir nécessairement le nombre de véhicules nécessaires. Tu es mieux de demeurer avec un contracteur connu et réputé efficace, que d’aller vers le p’tit nouveau qui peut disparaître très vite du milieu. »

Saint-Hippolyte

Dans la municipalité voisine, à Saint-Hippolyte, d’autres contracteurs estiment que le déneigement est devenu un cercle vicieux.

« Il faut avoir la vocation pour opérer en 2023-2024. D’une part, des clients sont trop plaignards : il faut tout de même attendre que la neige tombe, si la tempête a commencé tard un matin donné. Faire nos circuits pendant 4 heures, et ensuite recommencer continuellement pendant 13 heures parce qu’elle persistait (la première tempête surprise de 2022 qui avait laissé beaucoup de neige), ça use les chauffeurs dès le départ. On doit former ceux qui ont quitté. D’autre part, des chauffeurs de tracteurs veulent qu’on leur garantisse 250 heures (+/- 7 000 $) en salaire pour venir travailler. Il ne nous reste pas grand-chose en profit. À Saint-Hippolyte, il n’y a toutefois pas tant de circuits abandonnés », a témoigné un autre déneigeur préfèrant taire sa raison sociale.

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