D’ancien site anti-nucléaire à lieu artistique
L’ancienne base militaire du Lac-Saint-Denis était l’un des sites piliers de prévention d’attaque nucléaire de l’URSS contre l’Amérique du Nord. En m’approchant du site pour prendre des photos, des barrières et blocs de pierre me barrent la route. Située à Saint-Adolphe-d’Howard, elle avait pour fonction de surveiller l’espace aérien du Sud-ouest du Québec et du Nord-est de l’Ontario.
L’ancienne base militaire du Lac-Saint-Denis était en service des années 1950 à 1980. L’objectif : surveiller l’espace aérien du Sud-ouest du Québec et du Nord-est de l’Ontario. À l’époque, la guerre froide divisait le monde en deux blocs. La guerre en Ukraine rappelle que la thématique est d’actualité. À l’époque, pour contrer une éventuelle attaque soviétique par le pôle Nord, 33 stations de radar placées au Sud du Canada scrutaient le ciel. Nommé « Pinetree », le Québec comptait 7 stations radars comme ceux du Lac-Saint-Denis.
Faits historiques
Fondé le 1er août 1957, le site prenait le nom de « North American Air Defense Command ». En mars 1981, il devient NORAD [Commandement de la défense aérospatiale de l’Amérique du Nord]. Le site résulte d’une alliance américano-canadienne, précise le site internet Urbex Playground. L’alliance est encore en activité aujourd’hui. Depuis mai 2006, une coopération maritime est mise en place entre les deux pays. La base militaire du Lac-St-Denis entretenait d’étroites liaisons avec celle de la Macaza dans les Hautes-Laurentides.
Le complexe établi à Saint-Adolphe-d’Howard était les yeux, et Macaza, le poing. En cas d’attaque, des chasseurs Canadiens devaient intervenir en décollant depuis la piste du complexe situé aux nord des Laurentides. Plus de 1000 personnes y travaillaient, faisant de la base militaire l’un des grands moteurs économique la région. Hôpital, épicerie, bowling, cinéma : tous réservés aux soldats et aux membres des forces canadiennes.
Le mur de Berlin renversé, et après des avancées technologiques, le site du Lac-Saint-Denis est laissé à l’abandon en 2005. Après un rachat, le site devait accueillir des spectacles équestres, mais faute de succès, le projet devient abandonné. Le temps aura raison des anciennes infrastructures. La coupole-radar a été détachée du site pour être affectée à un autre site aérien, rapporte la Société d’histoire de Saint-Adolphe-d’Howard.
Fêtes, arts, urbex
Le site est l’un des repaires phare pour tous les adeptes d’urbex. Explorer des sites historiques laissés à l’abandon en frôlant parfois l’illégalité, c’est le principe de « l’urbex ». Pierre Bourgault est un photographe professionnel Montréalais de 46 ans. Passionné d’urbex, il a rejoint un groupe « secret » d’adepte de la discipline. À l’hiver 2015, il a bravé la neige pour se hisser en haut de l’ancienne base militaire du Lac-Saint-Denis. « Quand j’étais jeune, mes parents avaient un chalet tout proche du site. Ça m’a toujours intrigué », soutient-il.
« J’ai exploré beaucoup de sites abandonnés dans les Laurentides, notamment un vieux manoir abandonné. Ce qu’on aime, c’est que les vestiges des lieux qu’on visite témoignent directement du temps passé. L’une des règles de l’urbex, c’est de ne pas dégrader ou voler les objets que l’on rencontre », informe le photographe.
« L’ancienne base est un lieu assez magique, même si je m’attendais à trouver plus de traces de l’ancienne activité militaire. Le site reste assez mal conservé et les graffitis recouvrent la quasi-totalité de l’endroit », affirme-t-il.
En effet, les artistes s’adonnent à leur art. Ils troquent le béton grisâtre de la base contre de la peinture de couleur. Pour certaines personnes, la base est devenue un lieu de débauche. « Je me rappelle, quand j’avais 16 ans, il m’arrivait de faire des apéros sur le site. C’était assez dangereux, il y avait des trous et on était installé en hauteur », témoigne une adolescente de la ville de Saint-Sauveur.