Je vous félicite!
Par Mimi Legault
Oui, oui, vous méritez des félicitations parce qu’au moment où vous lirez ces lignes, nous serons à quelques heures de l’arrivée du printemps, du moins côté date. Vous et moi avons traversé l’hiver comme de vrais soldats! On n’oubliera pas de sitôt ce mois de février croustillant, plus que frisquet, cru. L’hiver a commencé en novembrbrbr… Un jour, j’avais dit à mes élèves que les 4 saisons duraient trois mois chacune. Un de mes plus futés de la classe avait alors rétorqué : mais pourquoi ma mère m’a dit que l’hiver durait six mois? Ouin… Comme avait lancé mon fils de 6 ans lorsqu’il faisait déjà noir à 16 heures à l’heure normale: il est tard beaucoup plus tôt!
Vous vous souvenez? Du -30 sous zéro! Du froid mordant que même Henri mon chat a refusé d’affronter. Il faisait si tellement froid (comme aurait dit l’humoriste Sol) que mon voisin est sorti avec son berger allemand pour revenir avec un chiwawa et qu’il a fallu d’un coup sec le libérer de la borne-fontaine. Tellement frett au chalet que pour se laver les dents, il a suffi de tenir la brosse immobile et les dents se sont chargées de faire le reste. Si terriblement froid qu’en crachant par terre, c’est un petit cube de glace qui a atterri. Si cent fois plus frisquet, que mon sourire s’est mis à gercer, qu’en marchant, mon nez s’est mis à couler comme dix érables. Si glacial que lorsque je suis revenue à la maison, ma figure était remplie de frimas et que je ressemblais à l’abominable homme des neiges. Tenez, juste à écrire ma chronique, j’ai les doigts engourdis de souvenirs gelés : chronique de faits d’hiver…
Parlant de souvenirs… Ça fait quelques années de ça, mais je n’ai jamais oublié. Un vendredi soir d’un mois de février, -34 sous zéro. Douce moitié et moi avions décidé de descendre au chalet situé dans l’Outaouais. Une vieille bicoque de la belle-mère, un chalet trois saisons mais bon, on y était bien. Pour monter, nous avions traîné nos deux VTT derrière notre voiture. Le trouble qu’on a eu pour les embarquer…Et le trouble qu’on a eu pour les débarquer une fois rendus… Des doigts gelés, des sacres, ah pis, d’la merde, on les a laissés là, on verra demain. Dans le chalet, il faisait si froid, qu’en parlant, on faisait de la buée. C’est vous dire… Il n’y avait rien à manger, on avait oublié d’arrêter au village, côté nourriture. Pour vrai! Rien dans les placards, sauf une canne de bines. Mais dans une armoire, on avait trouvé une bouteille de brandy 40 % d’alcool. On avait bu trois cul sec coup sur coup, dans de petits verres. Quand on n’a jamais pris cette espèce de liquide brun, ça fesse.
Douce Moitié a fait un feu dans la très vieille cheminée qui avait miraculeusement tenu le coup. On a ouvert de peine et de misère la canne de bines et on a dé-gus-té par petites gorgées cette magnifique soirée. Ça goûtait bon la vie! D’abord ce fut un petit rire, puis un plus gros, à la fin, on s’est roulé par terre à en avoir des crampes au ventre sans savoir pourquoi on riait tant! Et le lendemain, le soleil brillait de tous ses feux, durant la nuit, la terre s’était tirée une couverture blanche jusqu’au menton. On a préparé nos engins et nous avons fait la plus belle ride de notre vie. Ah j’oubliais : au milieu de notre randonnée en forêt, est apparue une cabane devant laquelle un écriteau qui disait : bienvenue!
On est entré, le gars au fond derrière le comptoir une bière à la main a crié : je vous sers mon spécial du jour? Il est venu nous porter deux assiettes, un sandwich, tenez vous bien, quelque chose de gras et d’épais que le cuistot a nommé bacon et des oignons crus avec beaucoup de mayo. Pour vrai! On a adoré, mais déconseillé pour les estomacs délicats. On a repris la route, une escapade inoubliable. Nous avons plein de souvenirs d’hiver aussi croquants les uns que les autres.
Ce matin, je regarde l’hiver d’un autre œil. Oui les glaçons épient à ma fenêtre. Comme la neige est belle…de ma fenêtre. Mais en même temps, on ne peut admirer la lune, les fleurs et la neige. On devra donner à la saison hivernale son 4%. Allez, bonhomme hiver, tu as joué parfaitement ton rôle, il est temps pour toi désormais de fondre dans le temps.