(Photo : France Poirier )
Caroline Bernard a été nommée directrice du Service de police de Saint-Jérôme.

Caroline Bernard : « Les victimes sont au centre de mes préoccupations »

Par France Poirier

Le 21 février dernier, la Ville de Saint-Jérôme annonçait la nomination de Caroline Bernard à titre de directrice du Service de police. Elle succède à M. Danny W. Paterson, qui continuera d’occuper les fonctions de directeur général adjoint de la sécurité publique et des services institutionnels. Elle devient ainsi la première femme à occuper cette fonction à Saint-Jérôme. Entrevue.

Est-ce que ça faisait partie d’un plan de carrière pour toi d’accéder à ce poste ?

Non, pas du tout. Quand il y a de nouvelles étapes importantes, on fait un peu le fil de notre carrière. Je revoyais la jeune policière de 20 ans que j’étais. [Mme Bertrand devient émotive.] C’est pour moi une grosse étape. C’est comme si c’était hier que je vivais ma dernière journée à l’Institut de police en 1993. Je me suis rappelé qu’à mon premier jour comme policière, j’étais très reconnaissante de travailler à Saint-Jérôme. J’étais habitée par un grand sentiment de faire la différence et de protéger les victimes, les plus vulnérables de la société, et je voulais être la meilleure policière. C’était ça mon plan de carrière.

De fil en aiguille, il y a des opportunités qui se sont présentées et avec toujours le même objectif de protéger les personnes vulnérables, j’ai gravi les échelons.

Quand vous avez commencé, ça ne devait pas être évident en tant que femme ?

J’étais résiliente. On était quatre policières à Saint-Jérôme, une par équipe. Je m’assume comme femme. Mon identité de genre, c’est d’être une femme. J’ai toujours été celle qui est allée chercher ses compétences. Je suis assoiffée d’apprentissage. Je me suis outillée dans toutes les étapes de ma carrière. Je suis arrivée première aux enquêtes, c’était exclusivement des hommes à ce moment-là. Par la suite, je suis devenue leur superviseure. Ç’a été de belles années. Je serai toujours reconnaissante à M. Pierre Bourgeois quand il m’a nommée capitaine. J’ai travaillé fort, j’ai bûché pour faire ma place. Je suis très fière d’avoir fait toute ma carrière dans le même corps policier en gravissant les échelons.

La santé mentale et l’itinérance font maintenant partie des grands enjeux pour les policiers. Comment travaille-t-on avec ces réalités ?

Notre rôle est toujours d’assurer la sécurité. Il faut responsabiliser nos partenaires qui ont aussi leur rôle à jouer. En matière de santé mentale, c’est le ministère de la Santé et des Services sociaux qui doit prendre charge. Nous serons toujours là pour assurer la sécurité. Ce sont de grands enjeux et on le voit dans les appels au quotidien qui ont augmenté considérablement au cours des dernières années. Ça augmente de 5 à 6 % annuellement. On parle de plus de 1 350 appels en santé mentale par année. Ce sont toujours des interventions à risque pour nos policiers. Les partenariats stratégiques sont nécessaires pour une prise en charge de ces personnes et qu’on en prenne soin. Mon but est d’assurer la sécurité de tous les citoyens

Quelle est votre vision du service de police ?

Dans mon processus de sélection pour le poste, on m’a posé la question. Influencée par le rapport sur la réalité policière, le livre vert, je veux améliorer la communication transparente envers la population et les médias. Je veux faire une différence et améliorer la proximité avec les citoyens. J’aimerais créer un comité qui serait élargi pour entendre ce que le citoyen, l’étudiant, le commerçant attendent de leur police. Quels sont les enjeux ? Ça restera toujours une priorité de mettre le citoyen, la victime au centre de nos décisions.

La violence conjugale est un dossier qui te tient à cœur ?

En 2014, quand j’ai été nommée directrice adjointe, c’est un des premiers mandats que je me suis donné. C’était d’avoir un plan d’actions spécifiques en matière de violence conjugale et je le vois un peu comme mon legs. Toutes nos actions doivent être dirigées vers les victimes et les enfants. Comment améliorer le filet de sécurité, comment éviter l’inévitable. Je n’avais pas réalisé à ce moment-là pourquoi c’était si important pour moi. On me demandait si j’avais été victime de violence conjugale, mais non. Je n’ai jamais vécu ça, ni chez moi, ni dans mon enfance. C’est en faisant le fil de ma carrière que j’ai réalisé que mon premier appel, c’était ça. Tu ne veux jamais voir ces images qui t’habitent toute ta vie. Je pense souvent à la famille de la victime, à ses amis qui sont venus la rapporter disparue. On n’oublie jamais ça. Je me suis dit : comment on peut améliorer le processus ? J’ai lu beaucoup, je m’informe. J’essaie de voir ce qui se fait de nouveau et d’améliorer nos façons de faire. Là encore, on a besoin de partenaires externes.


Caroline Bernard s’est jointe au Service de police de la Ville de Saint-Jérôme en 1993, d’abord comme patrouilleuse, puis enquêteuse. Depuis 2014, elle occupe le poste de directrice adjointe. Titulaire d’un certificat en gestion policière de l’Université du Québec à Trois-Rivières et d’une maîtrise en administration publique de l’École nationale d’administration publique, elle agit également comme vice-présidente au sein de la Commission de formation et de recherche de l’École nationale de police du Québec. En 2023, Mme Bernard a reçu le grade de Membre de l’Ordre du mérite des corps policiers, une distinction honorifique qui reconnaît les réalisations exceptionnelles et les services méritoires rendus par des membres des services de police canadiens.

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